Nuits de Chine, nuits câlines?
Depuis la mi-juin, le yuan chinois (CNY) a perdu plus de 7% face au dollar américain (USD), soit sa plus forte baisse depuis trois ans. Cette dégringolade a amplifié les craintes des investisseurs à l’égard des actifs chinois. A preuve, l’indice MSCI China a cédé près de 20% après avoir culminé début juin.
Le nouveau plongeon du yuan chinois a ravivé la crainte que l’ex-Empire du Milieu affaiblisse volontairement sa monnaie pour atténuer les retombées des droits de douane imposés par les Etats-Unis. Les investisseurs redoutent aussi une réédition du scénario d’août 2015, lorsque la crainte d’un «atterrissage brutal» de la Chine avait entraîné une dévaluation de 3% du yuan et une nette poussée de l’aversion au risque sur les marchés mondiaux.
Pas de dévaluation
Toutefois, l’actuelle baisse de la monnaie chinoise doit être replacée dans son contexte, autrement dit celui d’un raffermissement du billet vert face aux monnaies du G10 et des pays émergents en général. On peut dès lors estimer que ce recul ne reflète pas un changement délibéré de la politique de change. Il semble que la Chine puisse tolérer un certain recul du yuan, mais probablement pas une dévaluation pure et simple.
Situation préoccupante
La banque centrale de Chine a, d’ores et déjà, déclaré que la faiblesse du yuan s’expliquait par la montée des incertitudes extérieures et qu’elle ne répondait pas à une volonté de dépréciation désordonnée de la monnaie. Car, sinon, cela risquerait, à son avis, de déclencher un durcissement du discours officiel afin de rassurer les marchés.
La Chine s’efforcera de contrer une nette baisse de sa monnaie en raison du risque de fuite des capitaux. En 2015, les réserves de change du pays avaient fléchi de plus de 400 milliards de dollars dans les douze mois qui ont suivi la dévaluation du yuan, et la Chine veut éviter de nouvelles sorties de capitaux.
Néanmoins, sur fond de bras de fer commercial entre les Etats-Unis et la Chine, un léger repli du taux de change atténue les effets de second tour, comme la perturbation de la chaîne d’approvisionnement, qui pourrait affecter d’autres économies ainsi que les marchés. En 2015, l’affaiblissement du yuan avait été considéré comme une cause possible de la déflation mondiale, menace qui a aujourd’hui quasiment disparu.
Cependant, la situation reste préoccupante. Une dégradation des comptes courants de la Chine ou de ses données économiques, une accélération des sorties de capitaux ou des signes d’escalade des différends commerciaux au point de générer des mesures non tarifaires déstabilisatrices: ce sont autant d’éléments susceptibles d’aggraver l’inquiétude à l’égard du yuan et de nuire aux perspectives générales des actifs à risque. Les nuits de Chine ne sont pas forcément câlines!