Dépendants des inconnues chinoises
Le monde financier s’est fait une petite frayeur. L’espace d’un instant, seulement. L’économie chinoise est apparue moins dynamique ces derniers mois qu’on ne le pensait. Pire, selon des chiffres publiés vendredi matin, elle a atteint son rythme de croissance le plus faible depuis la crise financière. Les annonces des autorités, prêtes à intervenir, ont pourtant vite calmé les esprits.
C’était la deuxième «mauvaise» nouvelle concernant le moteur de la croissance mondiale cette semaine. La première venait de l’agence de notation Standard & Poor’s qui a rappelé quelques jours plus tôt, calculette à l’appui, que la dette chinoise, et en particulier celle des gouvernements locaux, lui rappelle plus le Titanic s’approchant d’un iceberg qu’un ferry voguant sur des eaux calmes.
Y a-t-il matière à s’inquiéter? Pas plus vendredi que les jours qui précédaient ou ceux qui suivront, du moins pas concernant ces statistiques à proprement parler. La croissance a été établie à 6,5%. Elle était attendue à 6,6%. Les pays occidentaux prendraient volontiers un tel chiffre, sans faire d’histoires à propos d’un point de pourcentage, tant cela montre à quel point la Chine reste dynamique.
C’est d’autant moins inquiétant que les tensions commerciales ont peut-être eu des effets sur la bourse chinoise, mais aucun, jusqu’ici, sur les exportations. En outre, mieux vaut se concentrer sur les tendances que sur un chiffre en particulier. Car cela a déjà été suffisamment souligné, y compris par le premier ministre chinois lui-même, il y a quelques années: on ne sait pas comment ces statistiques sont construites, si elles sont arrangées pour se rapprocher de l’objectif fixé par le gouvernement (6,5%). Montrer quelques doutes sur leur authenticité peut donc être sain.
Quant à la dette, les autorités semblent conscientes des dangers que son montant astronomique pose et elles ont déjà pris quelques mesures pour enrayer sa progression. Même si Pékin est limité dans son action, un frein trop fort à l’emprunt risque de se traduire par un coup d’arrêt de la croissance.
Le véritable problème est ailleurs. Le fait qu’on s’émeuve d’un ralentissement de la croissance de la Chine, finalement assez ridicule, montre à quel point l’Occident économique a les yeux braqués sur elle. Un pays sur lequel nombre de secteurs, si ce n’est tous, ont misé. A voir comment les géants de la tech se tortillent et finissent par écraser leurs principes éthiques pour entrer sur ce marché, on comprend à quel point il est devenu incontournable. La Suisse ne fait pas exception, qu’il s’agisse d’industrie ou de finance.
On peut s’accrocher à ces chiffres comme à des bouées et se laisser porter par leur hausse ou leur baisse. Et finalement, les interpréter comme on l’entend. Mais cela ne change rien au fait que l’on connaît peu ou pas suffisamment cette économie, ses rouages et la façon dont ils sont évalués. Une économie dont nous sommes toujours plus dépendants.
Un marché devenu absolument incontournable