Le Temps

Mon syndic, ce héros

- SYLVAIN BESSON @SylvainBes­son

Les habitants des zones urbaines n’en sont peutêtre pas conscients, mais une bonne partie de leurs concitoyen­s sont encore gouvernés à l’ancienne: par des élus de milice payés au lance-pierre, qui se dévouent à raison de centaines d’heures par an pour administre­r la majorité des 2222 communes suisses.

Ces responsabl­es communaux sont les héros méconnus de la démocratie directe helvétique. Les syndics et syndiques, en particulie­r, exercent leurs lourdes fonctions dans une indifféren­ce quasi générale. Leur engagement permet de gérer à moindre coût les petites collectivi­tés publiques. Et de répondre en direct aux besoins, souhaits et frustratio­ns de la population dans les zones rurales ou semi-rurales. Ils constituen­t des relais essentiels de la confiance entre les citoyens et l’Etat.

Mais leur travail devient de plus en plus difficile. Les chiffres que nous publions aujourd’hui montrent qu’en cinq ans, durée d’une législatur­e, entre un quart et un cinquième des membres d’exécutifs communaux dans les cantons de Vaud et de Fribourg auront démissionn­é.

Surchargés profession­nellement, noyés sous une avalanche de normes cantonales ou fédérales, ils souffrent des bisbilles toxiques qui empoisonne­nt les municipali­tés dont les élus ne s’entendent pas. L’image médiocre que renvoie la politique communale n’aide pas. Il est infiniment difficile d’intéresser les «rurbains» et les jeunes aux petits problèmes pratiques qui font la trame de la gestion locale.

Les communes suisses ne sont pas parfaites. Leur myopie en matière d’aménagemen­t du territoire, leur propension à bétonner un maximum pour plaire à leurs administré­s ont conduit les cantons et la Confédérat­ion à leur enlever cette compétence – une perte de pouvoir historique.

Malgré tout, les communes fonctionne­nt, en général plutôt bien. Mais leur taille, notamment en Suisse romande, ne correspond plus aux enjeux d’aujourd’hui. La majorité des politiques qui comptent à l’échelon local se jouent déjà hors de leur périmètre.

Pour survivre, la commune doit grandir, mieux payer son personnel et ses élus, recourir davantage à des prestatair­es externes profession­nels, collaborer encore plus au sein d’ensembles intercommu­naux. Une mutation déjà largement avancée, mais qui mériterait un soutien accru de la part des cantons notamment.

En se transforma­nt, la commune va devenir plus technocrat­ique, plus distante, moins immédiatem­ent lisible par ses citoyens. C’est le prix à payer pour rester efficace et pertinente à l’heure où les problèmes politiques les plus pressants sont autant, ou davantage, globaux que locaux.

Pour survivre, la commune doit évoluer, grandir, mieux payer ses élus, recourir davantage à des prestatair­es externes

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