Constituante valaisanne: quoi de neuf?
La moitié exactement des Valaisans a tenu à prendre part à l’élection des membres de sa future Assemblée constituante, participation légèrement inférieure à celle du scrutin fédéral qui se déroulait le même jour. Il est vrai que désormais, en Suisse comme ailleurs, les abstentionnistes forment le premier parti lors des votations et, surtout, des élections. Les constituants auraient intérêt à se pencher sur ce problème, crucial pour l’avenir de la démocratie. Mais, comme toujours, il convient de relativiser puisque, à Genève, en 2008, seuls 33% des citoyens daignèrent se déplacer pour ce même exercice.
Les candidats, toutes listes confondues, étaient au nombre de 646 pour 130 places disponibles et il s’agissait donc d’en choisir un sur cinq. L’offre était ainsi très abondante mais, dans un Valais où tout le monde se connaît, la méconnaissance des candidats n’a pas dû représenter ce frein que le corps électoral avance systématiquement pour justifier son désintérêt. Cependant, il ne s’agit d’un record puisque, en 1999, les Vaudois qui ambitionnaient d’écrire leur texte fondamental étaient 5,6 fois plus nombreux que les places disponibles (1000 candidats pour 180 postes) et 6,6 fois plus nombreux à Genève en 2008. A noter que l’âge moyen des élus valaisans est de 45 ans, ce qui est relativement jeune par rapport à la moyenne des citoyens suisses, et s’explique par la rareté des candidats très âgés ou très jeunes. Rien que de très normal dans ce chiffre.
L’assemblée valaisanne compte exactement un tiers de femmes, dans la juste proportion de leur présence sur les listes (35%). Ce beau succès s’explique-t-il par le débat égalitaire qui occupe actuellement les esprits? Sans doute un peu, quoiqu’il faille rappeler qu’elles étaient 30% dans le canton de Vaud déjà vingt ans auparavant, mais 17% seulement à Genève en 2008. A la décharge des électeurs du bout du lac, une liste composée uniquement de femmes avait raté de justesse le quorum avec 2,72% des voix, ce qui porte un double enseignement. D’une part, les listes monogenres sont contre-productives car être une femme ne résume en rien ce que représente un candidat. D’autre part, il faudrait prescrire tout quorum pour les Assemblées constituantes car la dispersion nuisible dans un parlement y est ici enrichissante. Le résultat le plus commenté de l’élection de dimanche dernier a été le succès de la société civile, en raison des 12,3% obtenus par la liste non partisane intitulée Appel citoyen. Triomphe, raz-de-marée, tour de force, a-t-on pu lire, ce qui semble un peu exagéré. Pourtant, ce constat prend du sens en raison du fait que, sur les listes des partis, 85% des candidats n’avaient jamais exercé de fonction politique. Dès lors, bien au-delà du score de la liste menée par Johan Rochel, c’est réellement la grande majorité de l’assemblée qui sera «citoyenne», puisque les anciens élus n’en représenteront que 30%. Le risque souvent évoqué d’une assemblée ressemblant à s’y méprendre à un Grand Conseil s’est éloigné, parce que les partis eux-mêmes ont fait en sorte que cela ne se produise pas: sur 646 candidats, 100 seulement avaient déjà eu un rôle politique.
Ainsi, c’est la fraîcheur plutôt que l’expérience qui a été privilégiée. Toutefois, cette forte proportion de législateurs extrêmement novices en politique présente des risques qu’il s’agira d’éviter. Il serait lassant que, sous prétexte «de refaire le monde», les débats prennent l’allure de logorrhée verbeuse. Il serait contre-productif que le texte final soit trop déclamatoire, trop axé sur les droits subjectifs et pas assez sur les droits objectifs. Il serait futile que les sujets à la mode prennent le pas sur les thèmes essentiels, ceux qu’une Constitution doit régler pour remplir son rôle de loi fondamentale. L’esprit enfin ne doit pas l’emporter sur la lettre! Sous cet angle, les travaux à venir seront particulièrement instructifs.
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