Le Temps

La blockchain au chevet de la médecine

La blockchain peut changer la gestion des coûts de la santé. Les HUG, qui ont organisé une conférence vendredi, travaillen­t sur plusieurs projets utilisant cette technologi­e, dont un réseau social sécurisé pour les médecins

- t SÉBASTIEN RUCHE @sebruche

La blockchain a aussi des applicatio­ns dans la santé. Pour financer des projets de recherche mais aussi pour de nouveaux modèles de prise en charge des coûts de la santé. Les liens entre ces deux mondes ont été décryptés dans une conférence organisée vendredi aux Hôpitaux universita­ires de Genève (HUG), qui eux-mêmes mènent plusieurs projets s’appuyant sur cette technologi­e.

«La blockchain ne va pas nous aider dans notre recherche scientifiq­ue, mais elle facilite largement les levées de fonds pour nos projets», résume Marco Alessandri­ni, créateur de HIVaway, une start-up active dans la lutte contre le sida, et chercheur à l’Université de Genève. Très à la mode, la blockchain peut être assimilée à une nouvelle génération d’internet, qui permet d’échanger directemen­t de l’argent ou des actifs financiers, sans intermédia­ire et avec un niveau de sécurité très élevé.

La blockchain pourrait également optimiser le paiement des traitement­s, explique Ahmed Abdulla, de Digipharm: «C’est la solution parfaite pour que les grandes pharmas soient rémunérées en fonction de l’efficacité de leurs médicament­s sur les patients, selon le nombre de jours d’hospitalis­ation ou la quantité de traitement­s supplément­aires nécessaire­s.» Dans ce cadre, la blockchain permet de retracer en temps réel l’évolution de l’état de santé d’un patient, et de déclencher automatiqu­ement des paiements grâce à des contrats intelligen­ts.

L’hôpital cantonal travaille également sur des projets liés à la blockchain et à des données médicales. Codirecteu­r de l’informatiq­ue aux HUG, Rodolphe Meyer et son équipe ont créé un réseau profession­nel pour les médecins de l’hôpital, une sorte de «super-LinkedIn» utilisant la confidenti­alité et la sécurité de la blockchain. «Il s’agit d’une base de données qui regroupe pour chaque praticien son CV, ses diplômes, collectés sur la base de données de l’Université de Genève par exemple, ses spécialité­s, mais aussi l’historique des interventi­ons qu’il a réalisées, avec un niveau de détail élevé concernant son rôle précis», précise le docteur en systèmes d’informatio­n.

Pas le Saint Graal

Parmi les autres projets en cours figure celui d’un «passeport radio» qui contiendra­it tout l’historique des examens radiologiq­ues d’un patient et la somme des radiations qu’il a reçues dans son parcours médical. Une autre applicatio­n possible se trouve dans le transport aérien, glisse encore Rodolphe Meyer, où un logiciel sur téléphone mobile garderait la trace de l’exposition des équipages aux rayons X.

Dans la période actuelle, où le grand public découvre la blockchain, Karsten Stampa tempère quelque peu l’euphorie ambiante: «Cette technologi­e est souvent vue comme le Saint Graal qui permettra de tout résoudre et de tout guérir. C’est évidemment faux. La blockchain doit être utilisée seulement lorsqu’elle est adaptée au modèle d’affaires d’une entreprise», affirme le dirigeant de Healthbank, une coopérativ­e zougoise qui construit une base de données pour les informatio­ns médicales.

Or Healthbank ne déposera pas ces données sur la blockchain, car elles ne pourraient pas être facilement effacées. Ce qui est contraire au règlement européen sur la protection des données, le RGPD.

«C’est la solution parfaite pour que les grandes pharmas soient rémunérées en fonction de l’efficacité de leurs médicament­s sur les patients» AHMED ABDULLA, DIGIPHARM

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