De la fin des blockchains et de l’open source?
Il y a deux semaines, cette chronique traitait de la tokenisation de l’identité d’une personne physique. Or mon colistier d’alors le sait tout aussi bien que moi: on peut (presque) tout tokeniser. Intéressons-nous dès lors aujourd’hui à savoir sur quelle plateforme et avec quelle technologie.
Les évolutions de la technologie blockchain sont nombreuses et variées et sont peu ou prou toujours confrontées aux mêmes enjeux: la vitesse, l’efficience énergétique, les coûts et la gouvernance. Or, au sein de l’ouvrage sans cesse remis sur le métier, une nouvelle technologie intéressante, basée sur la théorie des graphes, arrive dans la cryptosphère. Hashgraph vise à être au moins 20000 fois plus rapide que le bitcoin et ne propose plus de système de consensus par preuve de travail mais par simple preuve de présence.
Présentée à Genève par le responsable produit du groupe Hedera, Patrick Harding, dans le cadre d’une conférence organisée par Swisscom Blockchain, la technologie Hashgraph a ce je-nesais-quoi de hype et révolutionnaire qui donne envie de taper sur son clavier. Les participants au réseau ont été acceptés au préalable, à l’instar d’une blockchain privée. Ces «noeuds» peuvent y voir toutes les transactions en temps réel et les valider ainsi rapidement, dans leur ordre d’arrivée (contrairement à une blockchain avec des mineurs), de sorte qu’il n’est plus nécessaire de les conserver pour l’éternité dans un registre.
Le système est donc très efficient puisque l’on pourrait théoriquement se contenter de suivre les transactions depuis son téléphone portable et de les sauvegarder en cas d’intérêt seulement. Sans vraiment être une blockchain, Hashgraph permet néanmoins de déployer des smart contracts (ces algorithmes avec exécution automatique de tâches). En outre, en attaquant l’un des participants vérificateurs des transactions, personne ne peut remettre en cause l’intégrité de ces dernières (en particulier du fait que celles-ci ne restent pas longtemps en ligne).
Mais la vraie révolution ici est autre. Chez Hedera Hashgraph, personne ne peut améliorer le protocole sans en payer un lourd tribut. En effet, le code source a été patenté aux Etats-Unis de sorte que quiconque – pour l’art ou pour faire parler de lui – proposerait des améliorations pratiques au protocole de base (comme un «fork» dans le monde de la blockchain) pourrait se voir poursuivi en justice sur sol américain pour violation de brevet. Fin de l’open source donc comme d’une certaine vision du bien commun. Ou comment brûler les ailes des rêveurs Satoshi Nakamoto (Bitcoin) et Vitalik Buterin (Ethereum), ceux-là mêmes qui voulaient rendre au peuple ce qui appartient au peuple, à savoir le contrôle complet et inviolable de la création monétaire et de la propriété privée.
▅