La philanthropie réinventée
Protection de l’environnement, soutien à la recherche en oncologie, éducation… Dans tous les domaines, la philanthropie passe par une mue profonde. Elle fait l’objet d’un colloque interdisciplinaire à Genève
Il existe à Genève une tradition séculaire de la philanthropie. Depuis quelques décennies, avec le nombre croissant des organisations internationales, un véritable écosystème s’est développé sans que ses contours ne soient encore clairement perçus. Il ne s’est pas jusqu’ici distingué par sa transparence, il ne brille pas toujours par son efficacité. Mais une vague d’innovations atteint la Suisse et révolutionne l’univers discret des mécènes et des fondations. Affiché par les pouvoirs publics, le projet de faire de ce secteur d’activité une priorité stratégique pour la région pourrait enfin devenir une réalité tangible.
Le nouveau Centre en philanthropie à l’Université de Genève cristallise en quelque sorte cette ambition. Créé l’an passé, dirigé par le professeur Henry Peter, il vise une approche interdisciplinaire du domaine (lire l’interview en page 4). C’est d’ailleurs ce qui le distingue des autres lieux de recherche en Suisse et dans le monde puisqu’on y aborde la philanthropie sous l’angle à la fois du droit, de l’éthique, de la psychologie, des neurosciences… Le prochain événement organisé par le centre, le 10 décembre prochain, à Genève, en partenariat avec Le Temps, porte justement sur les liens complexes entre les émotions et la philanthropie. Pourquoi donne-t-on? Une interrogation passionnante qui vaut d’ailleurs pour les grands donateurs comme pour les plus modestes.
Mais c’est au sein des fondations qu’il faut aller chercher les changements de pratiques les plus spectaculaires. Signe des temps et comme en témoignent les acteurs interviewés pour ce cahier spécial, on recourt de plus en plus dans le monde de la philanthropie à une terminologie empruntée à la Nouvelle Economie. Parce qu’il est devenu essentiel de suivre l’utilisation des fonds et de mesurer leurs impacts sur la société. Parce qu’il faut aussi trouver de nouveaux modes de financement alors que la contribution des Etats à l’aide au développement stagne. Qu’on parle d’environnement ou d’urgence humanitaire, d’éducation ou de la nécessaire accélération de la recherche sur le cancer (lire en page 2). Les nouveaux outils de la philanthropie vont de pair avec sa nécessaire professionnalisation. Les bons sentiments ne suffisent plus. L’heure de l’altruisme efficace a sonné. ■