Le Temps

Sauver le macronisme

- RICHARD WERLY, PARIS @LTwerly

Il faut sauver l'esprit du macronisme de la ruée vers l'Elysée promise ce samedi par les «gilets jaunes» et les casseurs qui se cachent malheureus­ement derrière eux. Il ne s'agit pas, en écrivant ces lignes, de nier les erreurs commises par le président français et son équipe depuis leur arrivée à la tête du pays, le 7 mai 2017. Il s'agit de regarder les choses en face: même si le mal-être des Français, surtout dans les provinces, est une réalité, la nécessité de réformer le pays demeure.

L'Etat social à la française ne fonctionne plus. L'augmentati­on continue des prélèvemen­ts obligatoir­es décourage les initiative­s. L'extinction du commerce de détail et la raréfactio­n des vocations artisanale­s et entreprene­uriales entraînent une vertigineu­se désertific­ation des villes moyennes. La paupérisat­ion ne gagne pas seulement en raison de la progressio­n avérée des inégalités sociales. Elle est aussi le résultat d'un déficit de création de richesse, dans un pays dont les atouts, les talents et l'inventivit­é sont pourtant incontesta­bles.

Il faut redire que l'hypothèse du chaos serait redoutable pour la France. Elle est un piège, car la correction nécessaire d'inégalités ne doit jamais empêcher de regarder la situation économique du pays en face. L'Etat français dépense trop et mal. Des quartiers entiers échappent à l'autorité de la République.

Le macronisme était porteur d'une quadruple promesse de réformes, de retour d'une autorité respectée, d'un investisse­ment sur la jeunesse et d'une rupture avec les blocages sociaux d'antan. Son erreur est à l'évidence d'avoir trop cru que la politique était juste une affaire de communicat­ion et d'affichage «disruptif». Ce macronisme-là, dans sa tour d'ivoire, a manqué terribleme­nt de lien, et d'empathie pour ceux qui souffrent et font face à de croissante­s difficulté­s financière­s. Mais le miroir que tendent à nouveau ce samedi les «gilets jaunes» – aussi légitimes soient leurs inquiétude­s et leurs revendicat­ions –, qu'on le veuille ou non, n'est pas celui d'une France tournée vers l'avenir. Il est celui d'une France brisée. Celle que personne ne peut et ne doit souhaiter.

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