Andreane Jordan Meier, chargée de vendre les atouts économiques vaudois
«Un tissu économique aussi varié est une chance énorme, il faut le maintenir» ANDREANE JORDAN MEIER Le 1er janvier 2019, cette avocate de formation prendra la tête du Service vaudois de la promotion économique. Ancienne lobbyiste de l’industrie du tabac
Poignée de main ferme, sourire franc et pas décidé: Andreane Jordan Meier est une femme dynamique, et ça se voit tout de suite. «J’ai toujours eu besoin d’être dans le concret, dans la pratique», dit d’emblée l’actuelle secrétaire générale du Département vaudois de l’économie. A 44 ans, celle qui est le bras droit du conseiller d’Etat Philippe Leuba reprendra, le 1er janvier, les rênes du Service de la promotion économique et de l’innovation (SPEI) – qui compte 86 collaborateurs – du même département.
«Je vais pouvoir réaliser des projets qui me passionnent», se réjouit-elle, l’oeil bleu clair et pétillant. Des projets qu’elle n’a pu qu’entamer en tant que secrétaire générale, un rôle «de l’ombre», davantage organisationnel qu’opérationnel. Une frustration pour cette femme d’action, grande et élancée, «effrayée par ce qui stagne». Rien ne laissait présager qu’Andreane Jordan Meier travaillerait un jour pour l’Etat, réputé pour sa lenteur. Elle admet: «J’avais des idées préconçues.»
«Trop poussiéreux»
Après des études de droit à Lausanne, la jeune femme vise le brevet d’avocat. Lors du stage, elle se heurte à un univers «poussiéreux et rigide», son opposé. Elle passera néanmoins l’examen du barreau. Parallèlement, la Vaudoise se lance en politique, désireuse d’exploiter autrement son bagage juridique. Encouragée par son père, syndic de Rueyres, village d’à peine 300 âmes dans le Gros-de-Vaud, elle est élue sous la bannière des libéraux à la Constituante.
«Je me sentais totalement libérale: je défendais l’indépendance et la liberté de penser avec beaucoup de ferveur, raconte cette femme de droite. J’étais fermement contre les quotas féminins.» Celle qui jongle entre poste à haute responsabilité et éducation de ses trois enfants (3, 6 et 8 ans) n’a jamais été militante. Si elle en est arrivée là, c’est «grâce au soutien de mon mari», médecin indépendant.
Cette libérale convaincue a assumé le secrétariat général du Parti libéral vaudois durant deux ans avant de mettre en sourdine son engagement politique. Guidée par une envie d’international, la jeune femme entre à British American Tobacco Switzerland en tant que lobbyiste. Des rêves d’étranger qui vont se réduire… au canton de Vaud.
Retour aux sources
«Pour des raisons privées», ditelle avec pudeur, passant sa main dans ses cheveux châtain clair. Sans regret. Profondément attachée à sa terre d’enfance, elle dit être «un pur produit vaudois». Elle fait le grand écart entre économie privée et Etat de Vaud, intriguée par la fonction publique et poussée par l’envie d’avancer, son credo.
Dès le 1er janvier, Andreane Jordan Meier devra promouvoir les «multiples atouts» du canton: musées, hautes écoles à renommée internationale comme l’EPFL et l’Ecole hôtelière de Lausanne, PME – moteur du canton –, vignerons… Les vignerons? «C’est bien joli de vendre la beauté de Lavaux, mais il faut aussi valoriser les gens qu’il y a derrière», illustre la Vaudoise.
De multiples atouts économiques
Elle n’aime pas résumer le canton à l’Arc lémanique, un terme «artificiel». Vaud est riche de par sa diversité: le Gros-de-Vaud de son enfance, «grenier du canton», la vallée de Joux et son savoir-faire horloger, le Pays-d’Enhaut et son patrimoine culturel, le pôle d’innovation yverdonnois avec la Haute Ecole d’ingénierie. «Mettre davantage en avant les qualités de ces régions, c’est ce qui m’anime. Un tissu économique aussi varié est une chance énorme, il faut le maintenir.» Elle chapeautera une offensive autour de la marque «Vaud».
Andreane Jordan Meier reprend un service en mue: l’accent sera mis sur l’innovation. Pas assez de start-up sur sol vaudois? S’il faut continuer à stimuler leur création, la future cheffe veut avant tout leur permettre de se développer et de rester dans le canton. Elle ne le cache pas, le but final est de créer des emplois. Avec 1 franc sur 2 destiné à l’exportation, la qualité de vie des Vaudois dépend de l’innovation. Un quart des start-up les plus novatrices de Suisse sont vaudoises.
Un canton en pleine forme
Avec un taux de chômage très bas et l’entrée en vigueur de la RIE III cantonale, la tâche s’annonce aisée pour Andreane Jordan Meier. Elle nuance: «La concurrence fiscale est nettement plus forte qu’il y a vingt ans.» Vaud, qui dépend fortement du commerce extérieur, peut vite souffrir des incertitudes à l’étranger (Brexit, accord-cadre avec l’UE). Autre inconnue: la réforme fiscale des entreprises au niveau fédéral.
A côté de la promotion et de l’innovation, la libérale devra aussi manier le bâton. Son futur service regroupe la police du commerce, qui délivre les autorisations aux hôtels et restaurants, et la sécurité alimentaire. «C’est un enjeu public, il est primordial que l’image que l’on promeut soit crédible et irréprochable», souligne celle qui se dit «rigoureuse et loyale».
Et la vie privée dans tout ça? Andreane Jordan Meier, qui habite Montreux, l’évoque peu. «Je tiens beaucoup à ma deuxième casquette, celle de maman», dit-elle la main sur le coeur. Elle s’évade par la musique ou dans la nature. Toujours dans le mouvement, elle fait de la course à pied et de la randonnée. Court-elle vers le prochain défi à relever?