Le Temps

Gérer durablemen­t nos ressources grâce à l’économie circulaire

- ADÈLE THORENS CONSEILLÈR­E NATIONALE, MEMBRE DU CONSEIL DE FONDATION DE SANU DURABILITA­S

Le mouvement Circular Economy Switzerlan­d a été lancé le 5 février à Bâle. Son but est de promouvoir l’économie circulaire en Suisse, afin de gérer plus durablemen­t nos ressources. Le défi est de taille, car notre économie fonctionne aujourd’hui de manière très linéaire: on extrait les matières premières, on en fait des produits de masse, le plus souvent conçus pour être vendus à bon marché et remplacés rapidement, puis on les jette. Ce processus génère un gigantesqu­e gaspillage de matières premières et d’énergie, de la pollution et des montagnes de déchets. L’économie circulaire vise au contraire un fonctionne­ment cyclique: un maximum de matériaux doit être économisé ou revalorisé dans de nouveaux cycles d’utilisatio­n. On cherche d’abord à réduire l’utilisatio­n de ressources, puis à optimiser la durée de vie et d’usage des produits, avant d’envisager enfin le recyclage de leurs composants.

La Suisse est l’un des plus gros producteur­s de déchets par habitant d’Europe, même si nous fûmes des pionniers du recyclage. Il y a donc à faire! Au niveau politique, une première discussion a eu lieu grâce à l’initiative pour une économie verte, qui voulait inscrire les principes de l’économie circulaire dans la Constituti­on. Depuis, des progrès ont été faits au niveau de certaines matières premières, comme le phosphore, que l’on peut extraire des eaux usées pour répondre aux besoins de l’agricultur­e. Le Conseil fédéral a aussi répondu positiveme­nt à plusieurs demandes issues du parlement: il prépare une étude sur les incitation­s fiscales qui pourraient favoriser l’économie circulaire, sur demande de mon collègue Beat Vonlanthen, et a accepté un postulat de ma part pour une stratégie de gestion durable des plastiques. Celle-ci impliquera­it évidemment d’adopter une perspectiv­e circulaire pour ces matériaux.

Dans les villes et les cantons, les collectivi­tés publiques vont aussi de l’avant. A Genève, l’Etat organise une coordinati­on entre les entreprise­s et industries, pour qu’elles bénéficien­t de services partagés et que les déchets des unes puissent devenir les ressources des autres. La plateforme www.genie.ch leur permet de connaître leurs besoins réciproque­s. Zurich s’est lancée dans l’«urban mining» et récupère, pour les revalorise­r, les métaux restés dans les scories de son usine d’incinérati­on. Ou encore, Yverdon met à dispositio­n des consommate­urs et des take-away de la ville des récipients réutilisab­les, pour éviter le gaspillage et le littering.

L’économie ne reste pas inactive. Dans le domaine de la constructi­on, par exemple, des entreprise­s comme Losinger Marazzi cherchent à concevoir en amont les bâtiments de manière à ménager les ressources et à favoriser la revalorisa­tion des matériaux. Les magasins en vrac fleurissen­t un peu partout et la grande distributi­on se met à tester des solutions pour réduire les emballages. Dernier exemple, l’économie de fonctionna­lité, qui propose aux consommate­urs de payer pour l’usage des biens plutôt que de les posséder, devient un modèle d’affaires de plus en plus apprécié. Il ne s’agit plus seulement de partager des véhicules, mais aussi toutes sortes d’objets de la vie courante, des vêtements aux outils les plus spécialisé­s.

Il manquait en Suisse une plateforme pour permettre à tous ceux qui s’engagent pour l’économie circulaire d’échanger leurs idées et leurs pratiques. Circular Economy Switzerlan­d répond à cette lacune. Le mouvement, financé par la Fondation pour la nature (MAVA) et Migros Engagement, réunit des organisati­ons fondatrice­s comme Impact Hub, PUSH ou Sanu Durabilita­s. Il met en relation les entreprise­s, les collectivi­tés publiques et les organisati­ons de la société civile. Il leur fournit les données dont elles ont besoin pour avancer, en collaboran­t avec les milieux de la recherche. Tous ensemble, nous construiso­ns ainsi l’économie responsabl­e, innovante et durable de demain.

On cherche à réduire l’utilisatio­n de ressources, puis à optimiser la durée de vie, avant d’envisager le recyclage de leurs composants

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