Renault, entre Fiat-Chrysler et Nissan
Le conseil d’administration du constructeur automobile français était réuni mardi pour débattre du projet de fusion avec Fiat-Chrysler. Question: qu’adviendra-t-il de l’alliance Renault-Nissan?
Comment se remarier sans divorcer avec pertes et fracas? En clair: le futur géant mondial Fiat-Chrysler-Renault gardera-t-il en son sein le japonais Nissan, dont la marque au losange possède 43,4% des actions (contre 15% de Renault pour Nissan) depuis leur alliance industrielle scellée en mars 1999? Cette question a dominé le conseil d’administration de Renault ce mardi, alors que l’Etat français, actionnaire du constructeur automobile, avait préalablement aplani ses difficultés avec FiatChrysler. Les discussions entre administrateurs, qui se réunissent à nouveau ce mercredi, ont permis, selon un communiqué, «d’étudier avec intérêt l’opportunité d’un tel rapprochement et de prolonger les échanges sur ce sujet».
Dans le contexte de la crise ouverte franco-japonaise déclenchée par l’arrestation et l’inculpation de l’ancien patron Carlos Ghosn au Japon pour «détournement de fonds» et «abus de confiance», cette interrogation est bien plus qu’une question de participations financières. Autour de Renault et Nissan s’est constituée la première alliance au monde en termes de ventes de véhicules, dont font partie les constructeurs Mitsubishi (Japon), Samsung Motors (Corée du Sud), Avtovaz (Russie) et Siam Motors (Thaïlande).
Des participations croisées labyrinthiques
Le rapprochement avec Fiat-Chrysler donnerait donc lieu à la fois à un mastodonte industriel, mais aussi à un géant dont les participations croisées risqueraient de devenir un labyrinthe. La direction japonaise de Nissan, dont les relations se sont beaucoup tendues avec Renault au fil de l’affaire Ghosn, a ainsi affirmé lundi son «optimisme» sur la possibilité d’un accord global, à la condition que sa technologie soit protégée, en particulier dans le domaine des futures voitures électriques.
Le point important de ce début de semaine est que l’Etat français, actionnaire de Renault à hauteur de 15%, est désormais acquis à l’idée d’une fusion avec FiatChrysler, dont les grandes lignes ont été dévoilées la semaine dernière. Sur le papier, le schéma évoqué est celui d’une structure faîtière installée aux Pays-Bas, qui serait détenue à parité par les actionnaires des deux constructeurs. Le siège opérationnel régional chargé de l’Europe resterait basé à Paris et l’actuel patron de Renault, Jean-Dominique Senard – nommé en janvier 2019 pour succéder dans l’urgence à Carlos Ghosn, contraint de démissionner – codirigerait le groupe avec l’actuel patron de Fiat-Chrysler, John Elkann. Les administrateurs de Renault ne devaient toutefois pas entrer mercredi dans le détail des négociations prévues pour durer plusieurs mois. Ce projet de fusion, valorisée à 30 milliards d’euros, aboutirait au plus vite en 2020.
Un autre sujet va très vite émerger: celui des aléas industriels et financiers posés par une telle opération, tant les difficultés de faire converger les cultures industrielles sont fortes, comme l’a prouvé ces derniers mois la crise entre Renault et Nissan. Il semble que l’offre de Fiat-Chrysler, sur laquelle travaillait Carlos Ghosn, a pu être un facteur déclenchant des hostilités judiciaires contre l’ancien PDG. La route vers la fusion commence à être balisée. Mais elle ne sera, de toute façon, pas de tout repos.