Le Temps

La globalisat­ion retrouvée morte dans une benne à ordures

- STÉPHANE BENOIT-GODET @SBenoitGod­et

L’ère de la globalisat­ion arrive à son terme. Le phénomène qui a façonné le développem­ent du monde et sa géopolitiq­ue ces dernières décennies démontre aujourd’hui par l’absurde qu’il est à bout de course. Repousser sur des territoire­s lointains les tâches les moins gratifiant­es de notre système de production crée des situations dramatique­s. Ces «externalit­és négatives», comme les nomment pudiquemen­t les spécialist­es, deviennent insupporta­bles tant pour nos conscience­s que pour nos économies elles-mêmes. A ce jeu-là, l’environnem­ent est à chaque fois perdant.

Depuis vingt ans, nous feignons de croire que «la Terre est plate». C’est ce qu’affirmait un livre qui a fait fureur au début des années 2000 en démontrant le potentiel de croissance d’un monde assuré d’avoir acquis une fluidité totale de ses échanges commerciau­x. Le traitement de nos déchets a ainsi suivi cette logique. Ils ont été s’échouer chez le plus offrant au prix d’un transport par bateau qui ne pèse rien dans la facture.

Mais aujourd’hui, ce grand carrousel se grippe. Plus aucun pays ne veut de nos vieux t-shirts depuis que la filière textile produit des vêtements quasiment pour rien. Quand la Chine décrète un moratoire sur ses importatio­ns de déchets, des communes américaine­s se retrouvent avec des tonnes de détritus sur les bras qu’elles ne savent plus gérer. Alors que des pays en Afrique et en Asie se positionne­nt déjà pour récupérer ce marché et devenir la nouvelle poubelle du monde, il est temps de s’interroger sur le bien-fondé d’une telle logique.

La France vient de décider d’interdire aux grandes enseignes – Amazon en tête – de détruire leurs invendus. Lorsqu’un Etat se retrouve à dire aux acteurs privés qu’ils jouent avec le feu en transforma­nt leurs propres produits en déchets sans passer par une phase de consommati­on, c’est que le système marche sur la tête.

Celui qui pollue doit payer et ne pas être soulagé du prix des ressources sacrifiées. La Suisse n’en est pas encore à exporter en masse ses déchets. Mais celle qui s’est longtemps considérée comme un modèle au milieu de l’Europe a vu d’anciens cancres la dépasser. Il est temps de devenir exemplaire dans le soin apporté aux ressources naturelles. Au risque sinon de perpétuer un système qui subsiste en se nourrissan­t de ses propres déchets.

Celui qui pollue doit payer et ne pas être soulagé du prix des ressources sacrifiées

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