Le Temps

Vu de Suisse, une réforme logique

- R. W.

Vu de Suisse, l’argument fatal peut sembler financier. Avec ses déficits à répétition et sa forêt de «régimes spéciaux», dont certains permettent à quelques catégories de salariés d’arrêter de travailler dès 55 ans, le système français de retraite par répartitio­n n’est simplement plus viable.

Le calcul est simple: comment payer les retraites de catégories d’âge nombreuses sur le plan démographi­que (celles du babyboom), alors que les cotisation­s maigrissen­t, en raison du chômage de masse qui perdure dans l’Hexagone (près de 10% de la population active) et de la diminution structurel­le de l’emploi salarié au sein des jeunes génération­s?

A bien y regarder, un autre problème est toutefois essentiel. Il s’agit, en réalité, de réparer en France un pacte social égalitaire, abîmé par les différence­s de statuts et de corporatio­n. Est-il normal, dans un pays qui proclame sans cesse son devoir d’égalité, que les fonctionna­ires perçoivent en moyenne une pension supérieure de 44% à celles des employés du secteur privé, soit environ 2500 euros mensuels contre 1700 en moyenne – selon une étude du Ministère de la santé de 2016?

La réponse est non. En soi, ce seul chiffre démontre sans doute pourquoi tant de Français rêvent encore, avant toute chose, d’intégrer la fonction publique.

L’âge légal de départ à la retraite, qui en Suisse est à 65 ans pour les hommes et à 64 ans pour les femmes, n’est qu’un élément du débat. La question derrière, en Suisse comme en France, est celle de la capacité des «seniors» à s’assumer financière­ment, une fois refermé le couvercle de leur carrière profession­nelle.

De ce point de vue, Emmanuel Macron voit juste. La première étape est de rendre le système lisible, pour permettre les comparaiso­ns et rendre possible les futurs ajustement­s. Il faut donc voir dans cette volonté de réforme macronienn­e le début d’une fin programmée: celle d’un système étatique de retraite devenu ingérable, parce que les intérêts particulie­rs l’ont emporté, peu à peu, sur l’intérêt général, fondement de la sécurité sociale.

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