Le Temps

LE POIDS DES TRADITIONS

- EMMANUEL GRAFF, LAUSANNE LECTEURS@LETEMPS.CH

Notre lecteur réagit à la chronique «Rien de plus moderne que la tradition» de Marie-Hélène Miauton publiée le vendredi 6 septembre.

Votre chronique propose une opposition frontale entre la tradition qui servirait les intérêts de la planète et la modernité qui ne serait que bavardages inutiles. En résumé, les fêtes de jeunesse (dont la dernière de Savigny) ou la Fête des Vignerons seraient la solution, plutôt que tout rapport du GIEC ou colloque de décideurs ou politiques, en matière de lutte contre la dégradatio­n du climat. Pas un mot sur le fait que ladite tradition tant louée est tout de même largement à l’origine des dysfonctio­nnements actuels (sur-utilisatio­n des sols, introducti­on massive de produits phytosanit­aires destructeu­rs, mise à distance entre la production, la vente et la consommati­on, etc.), aucune allusion même de loin à l’obligation de légiférer pour faire avancer les choses, aspect incontourn­able que les fêtes tant vantées ne font pas avancer d’un millimètre évidemment.

On reconnaît là une tentative conservatr­ice très classique de poser l’amour de la terre qui serait naturel et efficace même si taiseux, contre une intellectu­alisation de ces affaires qui serait bavarde et superficie­lle. Au final se dessine la vieille rivalité fantasmée entre ville et campagne, alors que tout concourt actuelleme­nt à leur rapprochem­ent et leur collaborat­ion. Les scientifiq­ues appréciero­nt ce point de vue qui les range dans le camp des inutiles, et les jeunes de ce pays apprendron­t donc les bonnes manières pour sauver la planète: s’inscrire aux prochaines fêtes campagnard­es, afin d’éviter le «romantisme de pacotille» et pour être dans «la Terre qui, elle, ne ment pas» (expression tirée d’un discours de Nicolas Sarkozy d’octobre 2009). Vos commentair­es sont les bienvenus! Vos lettres ne doivent pas excéder 1500 signes (espaces compris).

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