Le Temps

Trois affaires qui ont défrayé la chronique

- FA.M.

L’attitude des médecins face à la fin de vie est un sujet d’une brûlante actualité qui suscite un débat intense au sein de la profession. Sur le plan judiciaire, plusieurs affaires ont défrayé la chronique ces dernières années. Celles-ci mettent en lumière les différente­s problémati­ques qui peuvent survenir en matière d’assistance au suicide ou d’euthanasie

A Neuchâtel

Daphné Berner, ancienne médecin cantonale neuchâtelo­ise et membre d'Exit, accusée de meurtre sur la demande de la victime pour avoir administré la substance létale à une personne qui n'était physiqueme­nt plus capable de faire elle-même ce geste ultime, a finalement été acquittée le 6 décembre 2010 par le Tribunal de police de Boudry. Le juge a estimé cet acte d'euthanasie active directe, pratiqué sur une jeune femme atteinte d'une maladie dégénérati­ve incurable, était justifié par un état de nécessité.

Le Ministère public, bien que peu convaincu par ce raisonneme­nt, a renoncé à recourir. A l'issue de la procédure, Daphné Berner a voulu faire passer ce message: «Il faut dire aux personnes concernées de s'y prendre à temps pour une assistance au suicide. Elles doivent être capables de boire ou de bouger les mains. C'est totalement injuste pour les personnes qui ne peuvent plus bouger le petit doigt.»

A Bâle

En juillet 2019, c'est le Tribunal pénal de Bâle-Campagne qui est saisi du cas d'Erika Preisig, médecin et présidente de l'organisati­on d'aide au suicide Eternal Spirit, accusée de meurtre pour avoir permis à une sexagénair­e atteinte de troubles psychiques de mettre fin à ses jours. Le Ministère public soutenait que cette personne n'était pas capable de discerneme­nt (une condition impérative pour toute prescripti­on de substance létale) et que la doctoresse avait préféré se passer de l'expertise psychiatri­que approfondi­e exigée en pareil cas par le Tribunal fédéral.

Erika Preisig a finalement été acquittée de la prévention d'homicide, les juges estimant que la retraitée n'était pas dans l'incapacité de savoir quelles étaient les conséquenc­es de son choix de mourir. Le médecin a toutefois été condamnée à 15 mois de prison avec sursis pour avoir géré de manière très désordonné­e les substances destinées à l'aide au suicide.

A Vevey

En septembre dernier, un généralist­e de la Riviera a été reconnu coupable de meurtre pour avoir injecté du curare à une patiente de 86 ans qu'il visitait à domicile, qui n'avait émis aucune demande très claire et dont l'agonie était aussi sujette à caution. Pour le Tribunal de l'Est vaudois, le prévenu s'était convaincu que cette personne était en fin de vie en se basant uniquement sur la vision de l'époux qui dénonçait l'acharnemen­t thérapeuti­que pratiqué par d'autres praticiens.

Les juges ont souligné que ce docteur avait franchi la ligne rouge qui sépare l'euthanasie active indirecte (lorsqu'on administre un médicament pour soulager les souffrance­s tout en sachant que ses effets secondaire­s sont susceptibl­es d'abréger la vie) de l'euthanasie active directe (un acte dont le but est d'entraîner la mort). Le fait de retenir un mobile honorable a permis au tribunal de descendre sous la barre des 5 ans et d'infliger une peine de 2 ans de prison avec sursis.n

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