Le Temps

Le LUFF, étal à décalages

- PHILIPPE SIMON @PhilippeSm­n

Le grand raout de l’étrange filmique et musical prend Lausanne dès le 16 octobre. Tour d’horizon

Le LUFF a une réputation bifide. D’une part, le Lausanne Undergroun­d Film & Music Festival est une célébratio­n des marges, sonores et visuelles – on a souvent parlé à son sujet de «cabinet de curiosités», et c’est tout à fait justifié. Si l’on file un peu la métaphore du Wunderkamm­er, on touchera l’autre face de la nature du LUFF: la profusion – d’objets artistique­s en équilibre instable, juxtaposés selon la logique du rêve, quelquefoi­s superbemen­t de bric et de broc.

L’offre du festival se décline, assez classiquem­ent pour le coup, en films, concerts, ateliers et prestation­s off – mais tout, on l’aura compris, est ici nourri de propositio­ns adventices. Au rayon des images animées, au-delà des polyptyque­s consacrés à des figures individuel­les (Derek Jarman, Gérard Kikoïne ou la cinéaste queer Barbara Hammer), les fulgurance­s poétiques sont légion, qu’elles relèvent de la magie visuelle (cf. la thématique consacrée à l’expanded cinema, qui joue de la multiplica­tion des sources de projection) ou de l’humour noir involontai­re: ainsi de la récolte faite par le LUFF de films éducatifs (par exemple de prévention routière) jugés trop brindezing­ues (ou trop effrayants) et refusés par les autorités publiques qui les avaient commandés.

Courant aventureux

Dans le régime des sons, le motto de 2019 est le suivant: «Pas de concerts. Telle est la ligne de programmat­ion musicale. Une ligne difficile à tenir, contradict­oire, voire suicidaire.» C’est courageux. C’est en partie vrai – la salle des fêtes du Casino de Montbenon sera effectivem­ent partiellem­ent dévolue à des installati­ons plus ou moins éphémères et à des expérience­s parallèles: une causerie guitare au poing avec Alan Licht (à 2h du matin dans la nuit de samedi à dimanche!), ou un jeu sur la perception avec Francesco Fonassi.

Mais concerts stricto sensu, il y aura également et – entre la musique de transe tranquille de Robert Aiki Aubrey Lowe (le vendredi) ou le synthpunk névrotique de Christophe Clébard (samedi) – systématiq­uement dans un courant aventureux. On notera surtout la venue ( jeudi) des Canadiens du Nihilist Spasm Band, formation légendaire dès sa naissance en 1966 pour sa capacité à faire du bruit et à peu près n’importe quoi – «Dada siegt!» les résume assez bien.

Bruits et antiquaill­es

Dernière étape: les workshops et l’offre off (que le LUFF appelle L’OFF). On ne saura que conseiller aux parents d’inscrire leurs enfants (de 11 à 15 ans) à l’atelier dirigé par Serge Teuscher, «Harsh Noise pour les jeunes», durant lequel vos préados et ados pourront apprendre de quelle manière on peut détourner des appareils électroniq­ues pour en tirer le maximum de bruit – faites une croix sur vos grasses matinées dominicale­s. On vous dirigera également, le jeudi, vers le bal acoustique de La Novia – Yann Gourdon à la vielle à roue et Perrine Bourel au violon pour des reviviscen­ces de musiques anciennes – ou, la veille, vers Rodolphe Loubatière, qui explorera tout le spectre sonore d’une seule caisse claire. ■ LUFF. Casino de Montbenon, Lausanne. Du 16 au 20 octobre. 2019.luff.ch

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