Comment la guerre commerciale a cassé la croissance
Selon le FMI, la croissance atteindra 3% en 2019, contre 3,9% précédemment. L’accord négocié entre Américains et Chinois vendredi doit encore se concrétiser
L'économie mondiale poursuit sa descente aux enfers. Le Fonds monétaire international (FMI) a abaissé mardi ses prévisions conjoncturelles pour 2019 à 3%. Ce chiffre cache toutefois la dégradation graduelle qui a débuté il y a dix-huit mois, en même temps que le déclenchement de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine. Au départ, le FMI tablait sur une croissance de 3,9%, en hausse de 0,3% par rapport à l'année passée.
L'année prochaine s'annonce à peine meilleure. Selon le FMI qui a publié les Perspectives économiques mondiales mardi en marge de son assemblée générale d'automne (15-20 octobre, à Washington), «les barrières commerciales et les tensions géopolitiques, y compris les risques liés au Brexit, pourraient perturber davantage les chaînes d'approvisionnement et entraver la confiance, l'investissement et la croissance». Dans le meilleur des cas, le taux de croissance sera de 3,2% en 2020. «Si les tensions persistent, l'économie mondiale perdrait 0,8%», a prévu Gita Gopinath, la cheffe économiste du FMI.
Pour la Suisse, la baisse est plus spectaculaire. Le taux de croissance pour 2019 sera de 0,8%, contre 2,8% en 2018. Il remonterait à 1,3% l'an prochain.
Logiquement, l'accord négocié vendredi dernier entre Américains et Chinois devrait sonner la fin de la guerre commerciale. Force est de constater que le «ouf» de soulagement est prématuré. Car, en réalité, les jeux ne sont pas encore faits. Les Etats-Unis ne sont certes pas allés de l'avant avec l'augmentation des surtaxes punitives de 25 à 30% sur des produits importés de Chine le 15 octobre comme prévu. Mais ils pourraient changer d'avis à la moindre hésitation chinoise.
Regards tournés vers le prochain sommet de l’APEC
C'est l'achat massif de produits agricoles américains par la Chine qui intéresse le plus Washington. A ce jour, Pékin a déjà autorisé l'importation de 20 millions de tonnes de fèves de soja et 700000 tonnes de viande de porc. Les Etats-Unis attendent que les livraisons pour 2019 et 2020 se montent à 50 milliards de dollars. La Chine s'est également engagée à ouvrir davantage son marché aux fournisseurs de services financiers et à poursuivre les négociations sur la protection de la propriété intellectuelle en Chine.
Désormais tous les regards sont tournés vers le sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC) qui réunira le président américain Donald Trump et son homologue chinois Xi Jinping les 16 et 17 novembre au Chili. Il est prévu que les deux dirigeants y signent l'accord négocié la semaine passée à Washington. Dans une note écrite, la banque Natixis relève que les pourparlers devraient se poursuivre en vue d'une deuxième phase qui porterait sur les différends technologiques.
«Les négociations de la deuxième phase donnent à penser que les surtaxes américaines qui devraient entrer en vigueur en décembre seront vraisemblablement suspendues», anticipe Natixis. A ce propos, le secrétaire au Trésor, Steven Mnuchin, a été catégorique lundi soir: «Une série de droits de douane sur les marchandises chinoises entrera en vigueur si aucun accord n'est conclu d'ici là.»
Trump a besoin d’une victoire
Pour sa part, Jin Zhang, gérant chez Vontobel Asset Management, se veut optimiste. Selon lui, l'accord de vendredi pourrait constituer le premier pas vers la résolution du conflit sino-américain. Il n'exclut toutefois pas «le risque d'une nouvelle escalade des tensions, mais les deux parties reconnaissent qu'un accord présenterait des avantages pour les deux. Aux Etats-Unis, le président Donald Trump a besoin d'une victoire dans le contexte actuel de procédure de destitution.»
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