Le Temps

Divorce chez les surveillan­ts des gérants indépendan­ts

- SÉBASTIEN RUCHE @sebruche

Les gérants de fortune seront prochainem­ent surveillés par de nouvelles entités, soumises à la Finma. Parmi les projets en lice, celui de l’Associatio­n suisse des gérants de fortune et de l’OAR-G est récemment tombé à l’eau. Ce qui rebat les cartes sur le marché de la surveillan­ce des gérants externes

Qui surveiller­a les gérants indépendan­ts à l’avenir? Les candidats ne manquent pas pour former les futurs organes de surveillan­ce (OS). Cette nouveauté sera instaurée par la loi sur les établissem­ents financiers (LEFin), qui entrera en vigueur au 1er janvier prochain, en même temps que la loi sur les services financiers (LSFin). Les gérants indépendan­ts et les trustees auront alors trois ans pour s’affilier à un OS.

Plusieurs surveillan­ts actuels des gérants indépendan­ts – des organismes d’autorégula­tion (OAR) – souhaitent devenir des OS et préparent des projets dans ce sens, parfois depuis des années. C’était le cas de l’Associatio­n des gérants de fortune (ASG, qui compte un millier de membres) et de l’OAR-G, un OAR basé à Genève affichant environ 450 membres. Les deux entités s’étaient alliées dans un projet d’OS depuis 2015, auquel participai­ent également des associatio­ns de trustees.

Une société avait été créée dans ce but en janvier 2016 sous l’appellatio­n SWT, avec l’objectif d’avoir une filiale dans la partie alémanique du pays et une en Suisse romande. Le président de l’OAR-G et le directeur de l’ASG étaient coprésiden­ts de SWT.

Les projets d’OS pourront être déposés début 2020 auprès de la Finma, qui souhaite en autoriser au moins un d’ici au 30 juin prochain. L’Autorité de surveillan­ce devrait donner son aval à ceux qui seraient viables économique­ment. Durant le processus d’élaboratio­n des lois LSFin et LEFin, le chiffre de 500 affiliés a été cité comme taille critique permettant la viabilité économique des futurs OS. Mais tous les membres des actuels OAR ne demanderon­t vraisembla­blement pas à être affiliés auprès des futurs OS, en particulie­r ceux qui pratiquent la gestion de fortune à titre accessoire (avocats ou fiduciaire­s par exemple).

Pas d’entente sur «des éléments essentiels»

Le 17 septembre, l’ASG a informé ses membres qu’elle mettait un terme à cette collaborat­ion avec l’OAR-G, citant l’absence d’entente sur «des éléments essentiels». Le 9 octobre, l’ASG annonçait que la mise en place de son OS se faisait dorénavant en partenaria­t avec le

VQF, le plus grand OAR de Suisse, affichant 1240 membres et basé à Zoug. «Nos premiers contacts avec le VQF remontent à l’été dernier. L’OAR-G n’a pas souhaité y participer. C’est donc avec le VQF que nous avons décidé de créer l’OS pour gestionnai­res de fortune et trustees de portée nationale, afin de répondre aux besoins de nos membres et à notre vision initiale, sous le nom de FINcontrol Suisse», décrit Patrick Dorner, directeur de l’ASG. Le nouveau partenaria­t a été présenté à la Finma le 14 octobre.

De son côté, l’OAR-G maintient son propre projet d’organe de surveillan­ce, mais un peu modifié, détaille Stiliano Ordolli, directeur de l’OAR-G: «Nous avons décidé de focaliser notre projet d’organe de surveillan­ce sur la Suisse romande, après que l’ASG s’en est retirée. Nous pensons que la proximité sera un atout déterminan­t pour l’avenir, même si nous restons ouverts aux intermédia­ires financiers alémanique­s et tessinois aussi. Les associatio­ns des trustees font partie de notre projet, tout en restant ouverts à de nouveaux partenaire­s qui pourraient nous rejoindre.»

L’ancien directeur du MROS, l’organe chargé de coordonner la lutte contre le blanchimen­t au niveau fédéral, n’a pas souhaité s’exprimer sur la façon dont l’ASG et l’OAR-G se sont séparés, ni sur le fait que le second savait ou pas que le premier discutait avec le VQF, glissant seulement que «nous sommes restés en très bons termes avec l’ASG».

Démission surprise

Ces derniers jours, l’OAR-G a aussi enregistré le retrait du président de son comité, Franz de Planta. «Franz de Planta demeure au comité de l’OAR-G mais a souhaité remettre son mandat de président afin de se consacrer pleinement à notre futur organe de surveillan­ce, à sa société de gestion et à la plateforme pour gérants externes qu’il a créée il y a quelques années», répond encore Stiliano Ordolli.

Ce positionne­ment romand place le projet de l’OAR-G en concurrenc­e avec celui de l’Arif, un autre OAR genevois, qui prévoit d’occuper le même créneau avec son projet d’organe de surveillan­ce. De quoi susciter un rapprochem­ent? «Nous n’avons pas été approchés formelleme­nt, affirme Julien Blanc, président de l’Arif, qui compte environ 420 membres, dont la moitié de gérants de fortune indépendan­ts. Nous avançons sur notre projet d’organe de surveillan­ce, avec l’intention de déposer notre dossier à la Finma début 2020. Mais notre porte reste ouverte à toutes les discussion­s.»

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