Divorce chez les surveillants des gérants indépendants
Les gérants de fortune seront prochainement surveillés par de nouvelles entités, soumises à la Finma. Parmi les projets en lice, celui de l’Association suisse des gérants de fortune et de l’OAR-G est récemment tombé à l’eau. Ce qui rebat les cartes sur le marché de la surveillance des gérants externes
Qui surveillera les gérants indépendants à l’avenir? Les candidats ne manquent pas pour former les futurs organes de surveillance (OS). Cette nouveauté sera instaurée par la loi sur les établissements financiers (LEFin), qui entrera en vigueur au 1er janvier prochain, en même temps que la loi sur les services financiers (LSFin). Les gérants indépendants et les trustees auront alors trois ans pour s’affilier à un OS.
Plusieurs surveillants actuels des gérants indépendants – des organismes d’autorégulation (OAR) – souhaitent devenir des OS et préparent des projets dans ce sens, parfois depuis des années. C’était le cas de l’Association des gérants de fortune (ASG, qui compte un millier de membres) et de l’OAR-G, un OAR basé à Genève affichant environ 450 membres. Les deux entités s’étaient alliées dans un projet d’OS depuis 2015, auquel participaient également des associations de trustees.
Une société avait été créée dans ce but en janvier 2016 sous l’appellation SWT, avec l’objectif d’avoir une filiale dans la partie alémanique du pays et une en Suisse romande. Le président de l’OAR-G et le directeur de l’ASG étaient coprésidents de SWT.
Les projets d’OS pourront être déposés début 2020 auprès de la Finma, qui souhaite en autoriser au moins un d’ici au 30 juin prochain. L’Autorité de surveillance devrait donner son aval à ceux qui seraient viables économiquement. Durant le processus d’élaboration des lois LSFin et LEFin, le chiffre de 500 affiliés a été cité comme taille critique permettant la viabilité économique des futurs OS. Mais tous les membres des actuels OAR ne demanderont vraisemblablement pas à être affiliés auprès des futurs OS, en particulier ceux qui pratiquent la gestion de fortune à titre accessoire (avocats ou fiduciaires par exemple).
Pas d’entente sur «des éléments essentiels»
Le 17 septembre, l’ASG a informé ses membres qu’elle mettait un terme à cette collaboration avec l’OAR-G, citant l’absence d’entente sur «des éléments essentiels». Le 9 octobre, l’ASG annonçait que la mise en place de son OS se faisait dorénavant en partenariat avec le
VQF, le plus grand OAR de Suisse, affichant 1240 membres et basé à Zoug. «Nos premiers contacts avec le VQF remontent à l’été dernier. L’OAR-G n’a pas souhaité y participer. C’est donc avec le VQF que nous avons décidé de créer l’OS pour gestionnaires de fortune et trustees de portée nationale, afin de répondre aux besoins de nos membres et à notre vision initiale, sous le nom de FINcontrol Suisse», décrit Patrick Dorner, directeur de l’ASG. Le nouveau partenariat a été présenté à la Finma le 14 octobre.
De son côté, l’OAR-G maintient son propre projet d’organe de surveillance, mais un peu modifié, détaille Stiliano Ordolli, directeur de l’OAR-G: «Nous avons décidé de focaliser notre projet d’organe de surveillance sur la Suisse romande, après que l’ASG s’en est retirée. Nous pensons que la proximité sera un atout déterminant pour l’avenir, même si nous restons ouverts aux intermédiaires financiers alémaniques et tessinois aussi. Les associations des trustees font partie de notre projet, tout en restant ouverts à de nouveaux partenaires qui pourraient nous rejoindre.»
L’ancien directeur du MROS, l’organe chargé de coordonner la lutte contre le blanchiment au niveau fédéral, n’a pas souhaité s’exprimer sur la façon dont l’ASG et l’OAR-G se sont séparés, ni sur le fait que le second savait ou pas que le premier discutait avec le VQF, glissant seulement que «nous sommes restés en très bons termes avec l’ASG».
Démission surprise
Ces derniers jours, l’OAR-G a aussi enregistré le retrait du président de son comité, Franz de Planta. «Franz de Planta demeure au comité de l’OAR-G mais a souhaité remettre son mandat de président afin de se consacrer pleinement à notre futur organe de surveillance, à sa société de gestion et à la plateforme pour gérants externes qu’il a créée il y a quelques années», répond encore Stiliano Ordolli.
Ce positionnement romand place le projet de l’OAR-G en concurrence avec celui de l’Arif, un autre OAR genevois, qui prévoit d’occuper le même créneau avec son projet d’organe de surveillance. De quoi susciter un rapprochement? «Nous n’avons pas été approchés formellement, affirme Julien Blanc, président de l’Arif, qui compte environ 420 membres, dont la moitié de gérants de fortune indépendants. Nous avançons sur notre projet d’organe de surveillance, avec l’intention de déposer notre dossier à la Finma début 2020. Mais notre porte reste ouverte à toutes les discussions.»
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