Le Temps

L’armée de milice n’existe plus

- GUILLAUME CAREL @guillaume_carel

L’armée de milice fait partie de notre imaginaire national. On la disait «invincible» durant la Deuxième Guerre mondiale, elle aurait dissuadé Hitler de nous envahir. Elle serait le «creuset national» qui unirait ce petit pays polyglotte. Nous en sommes tellement fiers, de notre modèle de citoyen soldat, que nous l’exportons. Même Israël s’en est inspiré pour constituer son armée.

Mais ce mythe est devenu un fantasme. Près de deux tiers des hommes suisses ne font pas l’armée. Ils ne sont que 37% à effectuer leur service militaire jusqu’au bout. Et le Conseil fédéral s’en inquiète. Il a trouvé son bouc émissaire: le service civil.

Il viderait l’armée de ses forces vives, parfois en cours de service, alors que leur formation a coûté cher. Y accéder serait devenu trop facile. Pire, il mettrait en péril l’armée de milice. Le conseiller fédéral Guy Parmelin voudrait rendre l’accès au service civil moins attractif, alors que les civilistes effectuent déjà un temps de service une fois et demie plus long.

Le gouverneme­nt se trompe de cible. Le service civil ne menace pas les rangs de l’armée. Certes, il séduit de nombreux citoyens, mais leur nombre, 12%, est insignifia­nt par rapport à la quantité d’inaptes. Plus de la moitié des hommes suisses paient la taxe militaire, car ils se sont fait recaler par l’armée. Et, souvent, pour des raisons complèteme­nt inventées.

Pourquoi alors s’en prendre au service civil? Parce que ces citoyens se positionne­nt ouvertemen­t contre l’armée. Contrairem­ent aux inaptes, qui rentrent dans une statistiqu­e qui ne dit rien de leurs véritables motivation­s.

Le système de l’obligation de servir suisse bat de l’aile et doit être réformé. Il est en retard par rapport aux aspiration­s d’une grande partie de la jeunesse. Il n’inclut pas les femmes, qui ne peuvent participer que si elles en font le choix. Il ne respecte pas non plus le principe de l’égalité devant les obligation­s militaires.

Le système le plus adapté aux besoins de l’armée et à ceux des citoyens est celui d’une obligation générale de servir. Dans ce modèle, hommes et femmes sont astreints à un service. Ils ont libre choix entre service militaire, sapeurs-pompiers, protection civile, organisati­ons de la Croix-Rouge ou un service à la communauté, tant que les besoins de l’armée sont couverts. Même les étrangers résidant en Suisse peuvent rejoindre de façon volontaire un secteur non militaire.

L’obligation de servir va évoluer. Espérons que ce sera dans le sens d’une plus grande ouverture. Et cessons d’opposer les modèles. Civiliste ou militaire, le combat est le même: servir le bien commun.

Le système de l’obligation de servir bat de l’aile et doit être réformé

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