«A mon époque, un objecteur de conscience faisait de la prison»
En 1979, le chanteur romand Pierre Chastellain a été condamné à deux mois de prison pour avoir objecté.
«A mon époque, il y avait déjà des combines pour éviter de faire l’armée, par exemple en se faisant passer pour un homosexuel ou en simulant un mal de dos. Je connaissais quelqu’un qui avait pleuré sans arrêt pour se faire réformer. Mais moi, j’ai fait mon école de recrues. J’ai même effectué quelques cours de répétition. Je considérais que c’était mon devoir.
Jusqu’à ce qu’un ami, qui s’occupait d’enfants autistes, soit emprisonné pendant plus de huit mois pour objection de conscience. Après cet événement, je ne pouvais plus porter l’uniforme d’une institution qui mettait des personnes d’une telle qualité en prison.
Alors j’ai fait objection, pour montrer l’exemple. J’ai été convoqué devant un juge. Avec les conseils de la fondation Martin Luther King, j’ai décidé de faire le plus grand battage médiatique. A cette époque, il n’était pas encore obligatoire de prendre un avocat pour se défendre. J’ai fait appel à Anne-Catherine Menetrey [une personnalité politique vaudoise de gauche, ndlr]. C’était un régal de voir cette femme face à un colonel. De nombreuses autres personnalités de prestige sont venues témoigner en faveur de l’objection de conscience, dont Emile Gardaz, homme de radio, Jean Villars Gilles, poète, ou Michel Buhler, chanteur.
J’ai été condamné à 2 mois de prison. C’était peu, parce que j’avais déjà fait du service. Ils ne pouvaient pas dire que je me dégonflais. J’avais même des galons en tant que bon tireur. J’ai payé ma peine à la prison de Bochu.
On publiera un livre de cette expérience: Objection votre honneur. Il devait servir de mode d’emploi pour les objecteurs. On leur donnait des pistes et des conseils. Ceux qui refusent de faire l’armée sont souvent des tendres, des doux, tellement peu agressifs qu’ils ne savent pas se battre contre cette machine militaire.»
■