Les fondations provoquent de nouveau des dissensions
Un avant-projet mis en consultation ce jeudi souhaite renforcer l’attractivité de la Suisse pour les organisations d’utilité publique. Si le texte a été accepté en commission, il n’a toutefois pas fait l’unanimité
«Renforcer l’attractivité de la Suisse pour les fondations.» C’est l’objectif d’un avant-projet mis en consultation par la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats (CAJ-E) jeudi. Si l’une des mesures consiste à renforcer la transparence en créant un registre national des organisations d’utilité publique exonérées d’impôts, le reste des propositions vise à rendre leurs conditions-cadres plus attractives.
Deux mesures sont de nature fiscale. D’une part, la déduction d’impôts accordée sur les dons aux fondations d’utilité publique ne devrait plus être plafonnée – le plafond se situant aujourd’hui à 20% du revenu ou du bénéfice du donateur. D’autre part, l’avant-projet souhaite que les fondations versant des «honoraires appropriés» aux membres des organes de direction puissent bénéficier d’exonérations fiscales, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Le but visé étant de faciliter le recrutement de personnes qui acceptent de moins en moins d’assumer bénévolement ces fonctions sur des tâches complexes, selon le rapport de commission.
Le projet a néanmoins divisé la Commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ-N), qui a approuvé le projet par 9 oui contre 5 non et 8 abstentions. Si la mesure concernant l’exigence de transparence «n’était contestée par personne», le projet dans son ensemble a laissé «perplexe une grande partie de la commission pour différentes raisons, notamment liées au caractère hétéroclite du texte», commente Laurence Fehlmann Rielle, conseillère nationale socialiste de la CAJ-N.
Une «mesure alibi»?
Le Parti socialiste pour sa part avait «surtout l’impression qu’il s’agissait de faciliter l’exonération fiscale, avec une mesure sur laquelle tout le monde tombe d’accord – l’exigence de transparence –, qui semblait jouer le rôle d’alibi pour faire passer d’autres mesures liées à la fiscalité», ajoutet-elle.
Surveillance lacunaire
L’avant-projet émane d’une initiative parlementaire déposée en 2014 par le conseiller aux Etats PBD Werner Luginbühl. Le député avait déjà proposé un texte similaire par la voie d’une motion déposée en 2009, qui fut classée en 2014.
Depuis des années, les fondations font régulièrement l’objet de dissensions. Ce fut notamment le cas avec le récent projet modifiant la loi sur l’échange automatique de renseignements, qui épargne les organisations d’utilité publique, contrairement à ce qui était prévu dans l’avant-projet. Autre objet de controverse: la surveillance des fondations. Outre le manque de transparence du secteur, le Contrôle fédéral des finances pointait la surveillance lacunaire des fondations dans un rapport de 2017. Deux ans plus tôt, c’était une étude du think tank Avenir Suisse qui appelait entre autres à davantage de transparence et à une «surveillance plus incisive» du secteur.
Ce débat devrait s’intensifier: parallèlement à cette consultation qui s’achève en mars 2020, le Parti socialiste prépare également son propre projet sur la question, a appris Le Temps. Il pourrait prendre la forme d’une initiative parlementaire ou d’une motion et viserait à renforcer la surveillance des fondations.
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