Le Temps

RÉFLEXIONS SUR LES VOTATIONS GENEVOISES

- ÉRIC MERGUIN, GENÈVE

Les référendai­res ont plusieurs motifs de se réjouir des résultats des votations du 24 novembre 2019. En ce qui concerne le déclasseme­nt de la parcelle agricole dite du «Pré-du-Stand», les habitants ne sont pas tombés dans le panneau du paquet mal ficelé des autorités et des promoteurs.

Au premier chef, ce sont nos futurs jeunes sportifs d’élite, filles et garçons, qui peuvent nous remercier chaleureus­ement de leur avoir épargné d’aller respirer à plein poumons l’air pollué au kérosène des avions en décollage à une encablure des cinq stades de foot prévus sur cette parcelle. Sans compter les nuisances causées par les gaz d’échappemen­t des véhicules roulant sans discontinu­er sur l’autoroute qui longe ladite parcelle! Est-ce que nos autorités et les promoteurs soutenus par l’homme d’affaires Monsieur Magid Khoury sont venus sur place éprouver la piètre qualité de l’air dans cette zone? Les entraîneur­s du Servette ou des médecins du sport ont-ils voté oui en connaissan­ce de cause après s’être rendus sur place? On peut en douter sérieuseme­nt. En l’occurrence, notre premier souci a été celui de la santé de nos jeunes.

Second motif de satisfacti­on. Les partisans du déclasseme­nt ont parfois objecté que si ce terrain était à ce point soumis à un air aussi vicié, il devait être aussi impropre à une saine culture. Là encore, c’est ignorer ce que peut une agricultur­e durable, comme celle que pratique Monsieur Daniel Tissot, le paysan producteur céréalier qui cultive le dernier vestige du Pré-du-Stand.

Quand le sol n’est pas appauvri par une culture intensive, la terre séquestre une quantité considérab­le de CO2, alors même que les sols cultivés en Suisse sont gravement déficitair­es en carbone. Cette séquestrat­ion du CO2 dans les sols est aussi l’une des solutions majeures (avec la préservati­on des arbres par la reforestat­ion) préconisée­s par le Groupe d’experts intergouve­rnemental sur l’évolution du climat. Selon l’agronome Pascal Boivin, 700 000 tonnes d’équivalent CO2 manquent au sol genevois et devraient être restockées. N’aurait-il pas été insensé, irresponsa­ble, de dilapider l’une des dernières parcelles agricoles du canton? Le pire a donc été évité, même si la victoire a été acquise avec seulement quelques voix de différence.

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