Le sport peut inspirer l’art dans l’écoute du corps
Dans le monde du sport de haut niveau, atteindre l’excellence suppose des «sacrifices». Ces dévouements sont souvent faits au détriment de la santé physique, psychique et sociale du sportif. Ainsi, performance et santé ne semblent pas toujours résonner en symbiose. Il est vrai que le sport de haut niveau demande un investissement important pour atteindre des sommets, mais heureusement cette idée de «sacrifices» perd de son ampleur. En effet, l’importance de la santé des sportifs, tant physique que psychique, est aujourd’hui prise en compte. Une majorité des sportifs d’élite est accompagnée et entourée par différents professionnels (médecin du sport, physiothérapeute, psychologue, ergothérapeute, etc.) pour assurer un bon équilibre entre les contraintes de leur activité sportive et leur santé. Toutefois, il n’en est pas de même dans le monde des arts.
Un groupe de recherche à l’Institut des sciences du sport de l’Université de Lausanne (ISSUL) s’intéresse à cet équilibre entre performance et santé dans ce monde singulier, particulièrement chez les danseurs et chez les musiciens. Cette population est souvent comparée aux sportifs car elle fait face à des obstacles et contraintes similaires (importante charge d’entraînement, stress des concours, équilibre entre vie privée et vie sportive/artistique, etc.). Toutefois, l’encadrement des musiciens et danseurs de haut niveau n’est, pour le moment, pas encore aussi bien organisé que pour les sportifs, alors qu’il est possible de prévenir certaines difficultés rencontrées grâce à un accompagnement pluridisciplinaire adapté.
Tant les musiciens que les danseurs doivent s’entraîner plusieurs heures par jour afin de se produire à leur meilleur niveau. De ces heures d’entraînement souvent répétitif résultent fréquemment des douleurs physiques (entorses, douleurs articulaires, tendinites), voire des blessures. Un travail mené avec des danseurs montre que ces derniers ont tendance à minimiser les blessures et à vouloir reprendre leur activité le plus rapidement possible. La volonté de travailler pour atteindre l’excellence domine. Les douleurs physiques chez le musicien sont souvent dues à des troubles musculo-squelettiques au niveau du haut du corps (nuque, dos et épaule). Musiciens et danseurs font fréquemment appel à des professionnels (médecin, physiothérapeute) une fois la douleur ou la blessure déclarée, mais rarement de manière préventive.
Plus on s’investit, moins on apprécie
En parallèle à la santé physique, la santé psychique est souvent négligée par les musiciens et danseurs. Il est rare qu’un préparateur mental ou un psychologue du sport collabore avec eux. Si l’on observe une augmentation de leurs interventions ces dernières années, elles surviennent lorsque la surcharge d’entraînement ou le stress deviennent trop intenses et insurmontables. Au même titre que la blessure, un accompagnement lorsque le mal est fait est moins efficace qu’un accompagnement en amont, pour prévenir certaines difficultés qu’ils pourraient rencontrer.
Une récente étude du groupe de recherche de l’ISSUL s’est penchée sur le bien-être des musiciens en Suisse romande. Cent vingtsix musiciens ont participé à cette étude et ont répondu au questionnaire Quality of Life-BREF de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui s’intéresse au bien-être général (physique, psychique, social et environnemental). Des différences significatives dans la qualité de vie globale ainsi que dans la santé physique ont été relevées entre les étudiants en musique et les musiciens amateurs. Ces résultats confirment que les musiciens préprofessionnels ou professionnels, qui investissent un temps important dans leur pratique, présentent un bien-être inférieur.
A la suite de ces différents constats, il est évident que pour se produire à son meilleur niveau, en bonne santé, plusieurs aspects de sa santé sont à prendre en considération. Un accompagnement pluridisciplinaire et en collaboration avec le staff d’un sportif, d’un musicien ou d’un danseur est primordial pour répondre au mieux à ses besoins. Ce type d’accompagnement pluridisciplinaire est encore rare, que ce soit chez les musiciens ou les danseurs. C’est pour cela que l’Université de Lausanne, de façon novatrice, propose des formations dans le domaine de la psychologie du sport et de la performance afin de mieux former des professionnels dans l’accompagnement des sportifs et artistes.
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Cette thématique sera présentée par les deux autrices lors d’une conférence et d’un atelier pratique durant la Journée de la santé du musicien le 11.01.2020, organisée par l’Institut romand de pédagogie musicale (IRPM).