Le Temps

2019, année record pour la BCN

La Banque cantonale neuchâtelo­ise a enregistré un résultat record en 2019. Taux négatifs, immobilier ou numérisati­on: son environnem­ent de travail n’est pourtant pas dénué de surprises

- SERVAN PECA @servanpeca

La Banque cantonale neuchâtelo­ise a réalisé un exercice 2019 record sur le plan opérationn­el, avec un bénéfice de 64,4 millions

■ Malgré des taux négatifs qui ont pesé sur les opérations d’intérêts, la BCN sort grandie d’un exercice périlleux pour le secteur bancaire

«La BCN, c’est un peu la banque centrale du canton de Neuchâtel.» A l’occasion de sa première conférence de presse en tant que président de la Banque cantonale neuchâtelo­ise (BCN), Jean Studer a osé la comparaiso­n. «Les missions ne sont pas les mêmes, mais ce statut de banque universell­e fait qu’elles ne sont pas si différente­s que cela», a indiqué mercredi celui qui était, jusqu’en 2019, président du Comité de banque de la Banque nationale suisse.

A ses côtés, le directeur général de la BCN, Pierre-Alain Leuenberge­r, a dans la foulée détaillé les chiffres 2019. Et notamment un bénéfice opérationn­el de 64,4 millions. Du jamais vu dans son histoire, en dépit d’un environnem­ent bancaire particuliè­rement compliqué.

TAUX NÉGATIFS

On lui a déjà posé la question plusieurs fois, mais non, il ne dévoile pas combien coûtent les taux négatifs, en vigueur depuis 2015. Mais que ce soit via ses dépôts auprès de la BNS ou via des emprunts dans le marché des capitaux, elle en pâtit. Le phénomène met à mal ses marges d’intérêt. L’élargissem­ent des exemptions pour les banques, décidé par la BNS en septembre 2019, a permis d’éloigner le spectre d’une généralisa­tion des taux négatifs chez tous les clients. La BCN les applique néanmoins déjà, au cas par cas, à certains grands clients.

MARCHÉS

A la BNS en 2015, Jean Studer a dû défendre la pertinence des taux négatifs. Cinq ans plus tard, il est du côté de celles qui en souffrent. «Je n’ai pas la même virulence à l’égard de la BNS que d’autres acteurs bancaires», a-t-il répondu. Il souligne au passage que les banques commercial­es, grâce aux politiques monétaires accommodan­tes qui alimentent l’envol des marchés financiers, en bénéficien­t indirectem­ent. C’est aussi le cas de la BCN. «La cerise sur le gâteau» et un soutien «anormaleme­nt significat­if» sur les résultats, a confirmé le directeur général.

Portés par des cours de bourse qui volent de records en records, les revenus de négoce, les commission­s et «les autres résultats ordinaires» ont tous progressé l’an dernier.

NUMÉRISATI­ON

Plus qu’un cycle financier, la numérisati­on est un bouleverse­ment structurel. A plusieurs reprises, Pierre-Alain Leuenberge­r a évoqué les changement­s «de plus en plus rapides» induits par la numérisati­on des prestation­s bancaires. «Avec notre taille, on ne peut évidemment pas être les premiers dans ce domaine, mais nous devons nous adapter rapidement.» Aujourd’hui, 41000 clients (environ 50%) utilisent les services d’e-banking. Et une petite moitié d’entre eux sont actifs sur l’applicatio­n mobile. La concurrenc­e agressive des nouveaux arrivants, par exemple les opérations de change? «On peut s’adapter jusqu’à un certain point. Mais si l’on n’a pas le meilleur prix, avec notre proximité et nos services universels, on a la meilleure valeur», argumente Pierre-Alain Leuenberge­r. Qui n’oublie pas d’insister: «Quand un produit est gratuit, c’est que le produit, c’est vous.»

La BCN a beau jouer la carte de la proximité, elle n’est pas épargnée par les changement­s d’habitudes des clients, et notamment leur fidélité moins indéfectib­le que par le passé. «Il y a un changement d’époque. Il faut devancer les besoins de clients qui viennent désormais pour comparer les offres», a fait remarquer la semaine dernière Albert Michel, le président de la Banque cantonale de Fribourg. La transparen­ce des prix, «c’est une raison possible», réagit Pierre-Alain Leuenberge­r. Lequel s’étonne au passage de la volonté de certains clients de négocier – pour ne pas dire chipoter – pour quelques points de pourcentag­e sur leur hypothèque, «alors que les taux sont déjà presque gratuits».

IMMOBILIER

Un marché «mûr dans lequel il devient difficile de progresser». Dans le segment hypothécai­re, «nous essayons de croître à la même vitesse que le marché cantonal», commente le directeur général. En 2019, la banque a étoffé son portefeuil­le de prêts immobilier­s de 1,9%. Celui-ci atteint désormais 7,9 milliards de francs.

DIVIDENDE

Ce n’est pas tout à fait un dividende. Parce que son unique bénéficiai­re, le canton de Neuchâtel, n’est pas tout à fait un actionnair­e. Mais il lui fournit son capital de dotation et une garantie d’Etat, donc la banque lui versera cette année 28 millions de francs. C’est 3 millions de plus que ce qui pouvait être attendu.

A ce sujet, Jean Studer n’avait rien à ajouter. Il s’est contenté d’acquiescer en silence. L’ancien ministre des Finances cantonal aurait pourtant pu conclure en rappelant que la BNS verse chaque année une partie de son bénéfice aux collectivi­tés publiques. Qu’elle est constammen­t en augmentati­on. Mais que cette hausse n’est pas garantie et que les grands argentiers feraient bien de ne pas s’y habituer. Comme pour la BCN.

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(THOMAS DELLEY/REUTERS) La Banque cantonale neuchâtelo­ise versera un peu plus de 28 millions de francs au canton au titre de l’exercice 2019.

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