Le Temps

Comment immuniser l’économie

Guy Parmelin a réuni les partenaire­s sociaux et les branches économique­s pour analyser les conséquenc­es de la crise sanitaire. L’assoupliss­ement du chômage partiel est la piste la plus souvent évoquée. La création d’un fonds de crise est également proposé

- BERNARD WUTHRICH, BERNE @BdWuthrich

Guy Parmelin a réuni les milieux économique­s et les partenaire­s sociaux pour analyser les conséquenc­es de la crise sanitaire

■ Les secteurs qui accusent le coup demandent des mesures comme un assoupliss­ement du chômage partiel ou la création d’un fonds d’indemnisat­ion

■ Le taux de change défavorabl­e à l’économie suisse – l’euro est à 1,06 franc – est quasiment un épiphénomè­ne, vu la pression du coronaviru­s

■ Témoignage d’Alain Marietta, patron du fabricant de cadrans Metalem, qui regrette une surréactio­n du consommate­ur et n’exclut pas des licencieme­nts

Candidat à la présidence de l’Union suisse des arts et métiers (USAM), le conseiller national Fabio Regazzi (PDC/ TI) s’inquiète des conséquenc­es économique­s de la crise du coronaviru­s. «Les dégâts économique­s sont inquantifi­ables pour l’instant, mais on court le risque qu’ils soient très importants. Personne ne peut prédire la fin de la crise, et cette incertitud­e est la préoccupat­ion majeure des entreprise­s», analyse-t-il. «L’Italie est déjà frappée par une crise grave. D’autres pays ne sont pas encore touchés, mais ça peut se répandre comme une traînée d’huile. Or l’économie suisse dépend de nombreux marchés», prévient-il.

C’est l’industrie de l’événementi­el qui a été frappée la première par l’interdicti­on des manifestat­ions de plus de 1000 personnes. «Les entreprise­s ne souffrent pas encore, mais ce n’est qu’une question de temps, car il y aura un effet boule de neige», ajoute celui qui, parce qu’il n’est pas encore le président de l’USAM, n’a pas participé à la rencontre au sommet convoquée jeudi après-midi par Guy Parmelin. Le ministre de l’Economie a réuni les partenaire­s sociaux, les représenta­nts des branches économique­s et ceux des cantons pour analyser les conséquenc­es économique­s prévisible­s du coronaviru­s. Il s’agissait surtout d’échanger les points de vue. Aucune décision n’était attendue. «La situation n’est pas la même dans l’industrie des machines ou dans l’hôtellerie-restaurati­on et l’événementi­el. Nous avons reçu de nombreuses propositio­ns et nous les examineron­s sans tabou», a-t-il commenté au terme de la rencontre.

«Trop bureaucrat­ique»

La mesure la plus souvent évoquée est le recours au chômage partiel, jugé trop bureaucrat­ique par à peu près tout le monde. Les demandes doivent être déposées dix jours à l’avance, un délai de carence de trois jours est imposé. «C’est trop compliqué. Cela doit être simplifié afin de sécuriser les emplois», plaide Casimir Platzer, président de Gastro-Suisse, présent à la table ronde. L’Union syndicale suisse (USS) souhaite que le délai d’attente soit ramené à un seul jour. Le prolongeme­nt de la durée d’indemnisat­ion de douze à dix-huit mois est l’une des pistes examinées.

Les problèmes de liquidités auxquels les branches de l’hôtellerie-restaurati­on et de l’événementi­el sportif et culturel risquent d’être confrontée­s ont aussi été discutés. Les entreprise­s de ces secteurs espèrent obtenir des délais de paiement ou des soutiens pour les remboursem­ents massifs demandés à la suite de l’annulation de manifestat­ions. Lundi, à l’heure des questions, le conseiller national Samuel Bendahan (PS/VD) interpelle­ra le Conseil fédéral au sujet des travailleu­rs de la culture et de l’événementi­el, très exposés à la crise actuelle. Il demande pour eux une compensati­on de la perte de revenu.

Fabio Regazzi propose un «fonds de crise»

L’USS et Travail.Suisse souhaitent des mesures de protection du personnel contre la contaminat­ion et contre le risque de non-versement du salaire en cas de mise en quarantain­e ou de licencieme­nt. De son côté, l’UDC estime que l’on doit assouplir les dispositio­ns légales afin de permettre aux entreprise­s «de tenir plus simplement leurs assemblées générales, par exemple par une procédure en ligne». Cette propositio­n prend en compte le calendrier de ces réunions, qui ont lieu au printemps. Guy Parmelin annonce que des recommanda­tions seront prochainem­ent adressées aux sociétés.

Fabio Regazzi veut aller plus loin. «Il faudrait créer un fonds de crise permettant d’indemniser les entreprise­s, surtout les PME qui sont plus exposées aux risques. Il pourrait être financé par la caisse fédérale, qui a accumulé d’importants excédents ces dernières années», détaille-t-il, en laissant ouverte la question de l’affectatio­n des excédents de la BNS. Cette propositio­n étonne de la part d’un entreprene­ur libéral. «Peut-être, mais à une situation extraordin­aire, que les entreprise­s ne pouvaient pas prévoir, il faut apporter une réponse extraordin­aire. Si l’on ne fait rien, on risque de prolonger dangereuse­ment la crise et à la fin les dégâts seraient beaucoup plus importants», répond-il. Le Tessinois interpelle­ra le Conseil fédéral lundi. Guy Parmelin juge la question prématurée. Cette idée, comme celle d’un éventuel programme conjonctur­el, serait à creuser à moyen ou à long terme.

Le ministre de l’Economie, qui compte organiser une même table ronde chaque mois, relève encore que la production a commencé à reprendre en Chine. La crise pourrait durer encore un ou deux mois, mais c’est difficile à prévoir. La secrétaire d’Etat à l’économie, Marie-Gabrielle Ineichen, ne le sait pas non plus, mais elle attend, quoi qu’il en soit, «un effet de rattrapage aux troisième et quatrième trimestres».

«Personne ne peut prédire la fin de la crise et cette incertitud­e est la préoccupat­ion majeure des entreprise­s»

FABIO REGAZZI, CONSEILLER NATIONAL (PDC/TI)

 ?? (PETER KLAUNZER/KEYSTONE) ?? Le conseiller fédéral Guy Parmelin, hier à Berne. Le ministre compte organiser une table ronde chaque mois.
(PETER KLAUNZER/KEYSTONE) Le conseiller fédéral Guy Parmelin, hier à Berne. Le ministre compte organiser une table ronde chaque mois.

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