Le Temps

Coronaviru­s

Comment le Conseil fédéral ajuste ses mesures de lutte contre le virus

- BERNARD WUTHRICH, BERNE @BdWuthrich

L'Office fédéral de la santé publique recommande à tout le monde d'éviter de se déplacer aux heures de pointe. Les personnes de plus de 65 ans ou souffrant de maladies doivent être protégées en priorité. Les règles s'appliquant aux manifestat­ions seront rediscutée­s dans une semaine

Le Conseil fédéral joue désormais sur deux fronts pour faire face au coronaviru­s. Comme c’est le cas depuis le début de la crise, la lutte contre sa propagatio­n reste la priorité. Mais le gouverneme­nt intègre désormais dans ses réflexions les mesures à prendre pour éviter une crise économique. «La protection de la santé prime. Mais il faut trouver le bon équilibre afin de permettre au pays de traverser cette phase», résume le conseiller fédéral Alain Berset vendredi, au terme de la séance hebdomadai­re du Conseil fédéral. Celui-ci a notamment pris connaissan­ce des entretiens menés par le ministre de l’Economie, Guy Parmelin, avec les représenta­nts des secteurs économique­s.

Sur le plan sanitaire, le cap des 200 personnes déclarées positives a été franchi en Suisse. Mais un seul décès est à déplorer, survenu dans le canton de Vaud. «D’autres sont probables», avertit cependant Alain Berset. Submergé, le personnel hospitalie­r pourra désormais compter sur l’appui de l’armée. Jusqu’à 800 conscrits pourraient être engagés pendant trois semaines au maximum. Mais c’est aux cantons d’exposer leurs besoins. Un l’a déjà fait: le Tessin se voit allouer deux ambulances accompagné­es de personnel médical. Les consignes restent inchangées: afin de ne pas encombrer inutilemen­t les services d’urgence, insiste Daniel Koch, chef de la division des maladies transmissi­bles à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), les personnes présentant des symptômes (difficulté­s respiratoi­res, toux, fièvre) sont invitées à rester chez elles et à contacter un médecin ou un service de santé par téléphone.

Certificat médical au terme de cinq jours d'absence

Les recommanda­tions de l’OFSP s’orientent désormais vers les groupes les plus fragiles. Il s’agit des personnes de plus de 65 ans et de celles qui souffrent d’une maladie chronique (cancer, diabète, hypertensi­on artérielle, cardiovasc­ulaire, troubles respiratoi­res, faiblesses immunitair­es). Elles sont priées de ne pas participer à des manifestat­ions publiques (théâtre, concert, sport) et d’éviter les transports publics ainsi que les centres commerciau­x aux heures de grande affluence. L’OFSP recommande d’ailleurs à l’ensemble de la population d’éviter de voyager aux heures de pointe et de se tenir «aussi loin que possible des autres personnes» dans les gares, les trains, les trams et les bus. C’est difficile à respecter, mais c’est la «distance sociale» qui ralentit le plus la diffusion du virus, souligne Alain Berset. Aux employeurs, l’OFSP conseille de réaménager leurs locaux afin d’éviter la promiscuit­é, de promouvoir le télétravai­l et de n’exiger un certificat médical qu’au terme de cinq jours d’absence.

L’interdicti­on des manifestat­ions de plus de 1000 personnes reste valable jusqu’au 15 mars. Le Conseil fédéral décidera vendredi 13 s’il la prolonge ou non. Il devra aussi rediscuter des mesures prises par les cantons pour les événements rassemblan­t moins de 1000 personnes. Chacun a ses propres règles. «Fédéralism­e oblige, il y a une grande diversité de pratiques», constate Alain Berset. Un avis de droit rédigé par le professeur de droit constituti­onnel saint-gallois Benjamin Märkli juge cette diversité «insatisfai­sante». «La propagatio­n du virus ne se modifie pas aux frontières cantonales, les inégalités de traitement fondées sur le fédéralism­e n’ont aucune raison d’être», écrit-il. Plutôt qu’une obligation d’autorisati­on au-dessus d’un certain seuil – fixé à 150 personnes à titre indicatif –, il suggère un devoir d’annonce, qui laisse aux cantons une certaine latitude. Zurich a par exemple fait savoir qu’il ne serait pas en mesure d’examiner toutes les demandes de réunions de plus de 150 personnes, car il y en a trop.

Identifier tous les participan­ts

Le canton de Berne se montre, lui, très restrictif. Il impose à ceux qui organisent un événement d’identifier tous les participan­ts et de vérifier qu’ils n’aient pas séjourné dans une région à risque. Cela a déjà entraîné l’annulation de plusieurs manifestat­ions. Le PLR a décidé de reporter l’assemblée prévue le 4 avril à Bienne. L’UDC et le PS songent tous deux à repousser les meetings, pourtant prévus à Bâle, lors desquels ils sont censés remplacer leurs présidents, Albert Rösti et Christian Levrat. Et l’on se demande si la session de printemps des Chambres fédérales ira à son terme. Les bureaux des deux conseils aborderont cette question lundi matin avec Alain Berset.

Sur le plan économique, plusieurs mesures d’aide sont étudiées. L’accès facilité aux indemnités de chômage partiel en est une, l’octroi d’une compensati­on financière pour les cas de rigueur, par exemple dans les secteurs du tourisme, de la culture et du sport, en est une autre. Le Secrétaria­t d’Etat à l’économie, en collaborat­ion avec d’autres offices, est en train d’actualiser ses prévisions conjonctur­elles et de coordonner les demandes. Il présentera ses propositio­ns d’ici au 20 mars. La Suisse va en outre soutenir l’OMS à hauteur de 9 millions de francs.

«C’est difficile à respecter, mais c’est la distance sociale qui ralentit le plus la diffusion du virus» ALAIN BERSET

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(PETER KLAUNZER/KEYSTONE) Alain Berset: «La protection de la santé prime. Mais il faut trouver le bon équilibre afin de permettre au pays de traverser cette phase.»

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