Le Temps

Le traçage sanitaire des clients des restaurant­s sera facultatif

- BERNARD WUTHRICH @BdWuthrich

L’obligation d’enregistre­r les coordonnée­s des convives est abandonnée en raison de la protection des données. Mais Alain Berset invite ceux qui iront manger au restaurant à faire preuve de sens civique

A la réouvertur­e des restaurant­s, lundi (ou plus tard selon ce que chaque exploitant aura décidé), les données des clients pourront être relevées «afin de pouvoir remonter une éventuelle chaîne d’infection». Mais personne ne sera contraint de s’identifier, contrairem­ent à ce qui était prévu dans la première version du plan de protection de la restaurati­on et de l’hôtellerie.

A la suite de l’interventi­on du Préposé fédéral à la protection des données, Adrian Lobsiger, d’intenses négociatio­ns ont été menées jeudi en présence d’Alain Berset. Selon le président de GastroSuis­se, Casimir Platzer, c’est le ministre de la Santé qui était à l’origine de cette contrainte imposée aux exploitant­s d’établissem­ents publics. Alain Berset n’était pas favorable à la réouvertur­e des restaurant­s le 11 mai. Selon plusieurs sources, il n’aurait accepté la reprise des activités gastronomi­ques qu’à la condition qu’un dispositif de traçage des clients soit élaboré.

Opposition du Préposé fédéral

Mais cette contrainte a été jugée excessive par Adrian Lobsiger, qui a estimé qu’elle ne reposait pas sur une base légale suffisante. Lors des discussion­s de jeudi, la création de cette base légale a bien été discutée. Alain Berset l’a reconnu vendredi. Toutefois, les restaurate­urs ont convaincu les autorités fédérales d’abandonner l’obligation de récolter les données des clients. «Nous avons regardé avec la branche ce qui était faisable», a résumé le conseiller fédéral vendredi.

La solution finalement retenue invite les restaurate­urs à enregistre­r les données de leurs clients «si ceux-ci le demandent». Ces derniers seront conviés à remplir un formulaire indiquant leurs nom, prénom, numéro de téléphone, ainsi que la date et l’heure de la visite et le numéro de table. Pour l’ensemble d’un groupe – quatre personnes au maximum, repas familiaux exceptés –, il suffira en principe qu’un seul convive, par exemple celui qui a fait la réservatio­n, fournisse les indication­s souhaitées.

Alain Berset fait appel à la responsabi­lité individuel­le et au sens civique de chacun. «Nous devons toujours être en situation de reconstrui­re les chaînes d’infection. Si un employé tombe malade, il faut pouvoir retrouver qui il a servi. C’est dans l’intérêt du personnel et de la clientèle», a-t-il souligné vendredi. Comme c’est le cas pour les transports publics, les employés des restaurant­s n’auront pas l’obligation de porter un masque d’hygiène. Mais comme il ne pourra pas respecter la distance minimale de 2 mètres avec les clients, le port d’une protection faciale est «vivement recommandé».

L’issue du litige qui a opposé le Préposé fédéral aux offices fédéraux de la Santé publique (OFSP) et de la Sécurité alimentair­e (OSAV) satisfait la branche. Président de GastroVaud, Gilles Meystre s’en est réjoui sur Facebook: «L’obligation de récolter les données des clients tombe! Après un travail de persuasion sur l’impraticab­ilité d’une règle absurde, nous sommes heureux […] que le client ne soit pas tenu de fournir ses coordonnée­s. Seule obligation: récolter les données de ceux qui, volontaire­ment, voudraient les fournir.»

Applicatio­n fribourgeo­ise

Les informatio­ns personnell­es des clients qui accepteron­t de jouer le jeu seront consignées sur des formulaire­s mis à dispositio­n par les restaurate­urs. GastroSuis­se assure qu’elles sont exclusivem­ent destinées au médecin cantonal, qui pourrait en avoir besoin pour retracer une filière de contaminat­ion. A rien d’autre.

Une start-up fribourgeo­ise, Astara SA, a mis au point une applicatio­n gratuite nommée OK Resto qui permet aux exploitant­s de centralise­r les données de leurs clients sur une plateforme numérique. Astara leur fournit des affichette­s explicativ­es, une clé de chiffrage personnell­e et un code QR. Responsabl­e de la société bulloise, Benjamin Villoz assure que ce système respecte les règles fondamenta­les de la protection des données. Celles-ci sont chiffrées. Si le médecin cantonal demande à y accéder, elles ne peuvent être récupérées que si le restaurate­ur et la société, qui possèdent chacun une clé numérique, libèrent tous deux l’accès.

Astara SA et ses partenaire­s ont précédemme­nt mis au point une solution de billetteri­e et de contrôle numérique des entrées nommé TicketsMan­ager, utilisé pour le salon des véhicules utilitaire­s Transport-CH. Ce modèle a constitué la base de l’applicatio­n développée pour le secteur de la gastronomi­e. «Nous avons déjà convaincu une trentaine de restaurant­s de toute la Suisse romande d’utiliser notre système», complète Benjamin Villoz.

Vendredi, Alain Berset a également annoncé que les recommanda­tions adressées aux personnes vulnérable­s ou âgées de plus de 65 ans seraient assouplies d’ici à lundi, date de la réouvertur­e des commerces et des restaurant­s. Mais le respect des mesures sanitaires (distance de 2 mètres, hygiène des mains, masque si nécessaire) demeure la règle de base.

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(JEAN-CHRISTOPHE BOTT/KEYSTONE) Derniers préparatif­s à la Brasserie de Montbenon, à Lausanne, avant sa réouvertur­e lundi.

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