«Subterranean Homesick Blues», de Bob Dylan
Unfinished
Au printemps 1965, alors qu’il s’apprête à s’embarquer dans une mini-tournée anglaise qui culminera au prestigieux Royal Albert Hall de Londres, Bob Dylan a déjà à son actif cinq albums qui en ont fait un nouveau héros folk. Quelques mois plus tard, il sortira Highway 61 Revisited, enregistrement plus électrique, plus rock, qui déroutera certains de ses fans et marquera un premier tournant dans sa discographie.
Lorsqu’il débarque en Angleterre, Dylan est accompagné de Joan Baez (leur relation est alors à son crépuscule), mais aussi du réalisateur D. A. Pennebaker, qui, deux ans plus tard, dévoilera les coulisses de cette tournée dans Dont Look Back, qui reste aujourd’hui encore un des plus grands documentaires musicaux de l’histoire. A leur arrivée dans la capitale, le cinéaste a cette idée: mettre de côté la démarche cinéma direct de son entreprise pour mettre en scène une courte séquence accompagnant Subterranean Homesick Blues, un extrait de l’album Bringing It All Back Home, sorti quelques semaines auparavant et qui voit Dylan tenter pour la première fois de muscler sa folk, jusque-là résolument acoustique.
Dans une ruelle jouxtant l’hôtel Savoy, Pennebaker filme Dylan tenant une pile de pancartes sur lesquelles sont écrits des mots et expressions tirés des paroles du morceau. Le musicien, impassible, sans même faire semblant de chanter, dévoile les unes après les autres ces pancartes, qu’il jette ensuite négligemment au sol. A gauche de l’écran, au second plan, deux hommes discutent. De face, on reconnaît un imposant barbu qui n’est autre que l’écrivain Allen Ginsberg. Son interlocuteur est Bob Neuwirth, un chanteur folk proche de Dylan. La séquence, présentée au début de Dont Look Back et souvent copiée ou parodiée, est considérée comme l’acte de naissance du vidéoclip moderne.
■ dans une danse frénétique, erratique, rythmée par le rock extatique d’Arcade Fire. Elle sort de l’appartement, longe un couloir puis, miraculeusement, comme les enfants du Monde de Narnia, se retrouve dans une forêt de sapins. Il neige, tandis que des flashs lumineux donnent au décor une dimension magique.
Libérée, délivrée, Gerwig est aussi possédée. Tandis que le chanteur Will Butler passe furtivement derrière elle, la voici qui quitte l’atmosphère confinée des arbres pour se retrouver au milieu du public, dansant en compagnie d’un groupe de fillettes tandis que Butler a rejoint ses musiciens. Il y a là quelque chose de totalement euphorisant. Les cinq minutes que dure cette vidéo mettent durablement en joie. Clippeur star avant d’être révélé avec le génial Dans la peau de John Malkovich (1999), Spike Jonze avait déjà réalisé en 1994 une vidéo en plan-séquence (à une seule caméra, sans montage) pour le titre Undone – The Sweater Song, du groupe californien Weezer.
■ pour le morceau 1234, enregistré par la Canadienne Feist en 2007 et qui reste à ce jour son seul gros succès commercial. Mais en se compliquant la tâche avec une caméra montée sur une grue et pilotée à distance, ainsi qu’une quarantaine de danseuses et danseurs évoluant autour de la chanteuse.
Réalisé dans un vaste hangar, le clip commence le plus simplement du monde. Feist avance vers la caméra, puis pivote avant que soudainement, comme par magie, ne surgissent derrière elle des danseurs colorés comme une oeuvre de pop art. Trois minutes plus tard, ceux-ci disparaîtront subitement. Entre-deux, Daughters aura filmé une chorégraphie survoltée évoquant, à travers une vertigineuse plongée, les comédies musicales enchantées de Busby Berkeley.
Le clip a-t-il réellement été filmé en une seule prise? L’apparition et la disparition des danseurs qui l’encadrent auraient tendance à nous prouver que seule la chorégraphie centrale a été tournée en continu. Or ce n’est pas le cas, comme nous le montre un petit making of visible sur YouTube, ce qui en renforce la puissance. Reprise dans une pub pour l’iPod Nano, la vidéo a été détournée par Feist elle-même en compagnie de l’équipe de Sesame Street dans une version qui, au-delà de paroles réécrites, contient… une coupe.
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