Le Temps

A Genève, les restaurant­s à la peine

- SYLVIA REVELLO @sylviareve­llo

En ce premier jour de déconfinem­ent, les clients se font rares à la pause déjeuner. Pour des raisons opérationn­elles ou financière­s, plus de la moitié des établissem­ents sont restés fermés

Difficile de trouver un restaurant ouvert, plus difficile encore de trouver un restaurant avec des clients. En ce lundi matin pluvieux, premier jour du déconfinem­ent phase deux, la reprise s’annonce très lente à Genève où plus de la moitié des établissem­ents sont restés fermés. Pour des raisons opérationn­elles ou financière­s, les directives sanitaires imposées sont tout simplement impossible­s à respecter pour les restaurate­urs.

Pour ceux qui ont décidé d’ouvrir, rien n’est gagné. Maria Alvarado, gérante et propriétai­re de La Finestra, petit restaurant italien au coeur de la Vieille-Ville, confie sa détresse. Midi approche. Autour d’elle, les tables sont dressées. Dans la cuisine, ses employés s’affairent, mais aucune réservatio­n n’est pour l’heure annoncée. «Si l’activité ne reprend pas d’ici une à deux semaines, je vais me retrouver dos au mur, obligée d’emprunter encore ou de déposer le bilan», déploret-elle, soulignant qu’elle n’a pu trouver aucun arrangemen­t avec son bailleur au sujet du loyer.

De fait, une grande partie de sa clientèle, profession­nelle ou touristiqu­e, est aujourd’hui aux abonnés absents. «C’est dur d’y croire, mais nous sommes prêts à nous battre jusqu’au bout pour sortir la tête hors de l’eau», ajoute la patronne, tout en réajustant l’espace réglementa­ire entre les tables.

Aux abords d’Uni Mail, le service de midi s’annonce lui aussi très calme au Green Café, restaurant péruvien prisé des étudiants, qui suivent actuelleme­nt leurs cours à distance. «La situation est très préoccupan­te, confie la gérante, Nola Cartolin. Les salaires de mars ont été payés, mais nous avons du retard sur avril. Si la clientèle n’est pas au rendez-vous, nous allons perdre pied.» Masqués, ses employés s’affairent autour de boîtes en plastique. Pour ne pas décourager les plus angoissés, le Green Café propose également ses mets à l’emporter.

Plus haut, dans le quartier de Saint-Gervais, le bistrot L’Escalade s’en tire bien. Plusieurs tables occupées et des clients, un brin intimidés, qui continuent d’affluer. Des habitués surtout. Parmi eux, deux couples d’amis qui n’ont pas hésité à se réunir comme chaque lundi pour «reprendre les bonnes habitudes». D’humeur joyeuse, ils trinquent à la bière en attendant leur plat du jour.

«Effort collectif»

«Aussi vite que possible, aussi lentement que nécessaire», la maxime désormais mythique d’Alain Berset trône en bonne place sur le plexiglas qui sépare les tables. «C’est lui qui donne le ton», plaisante un serveur masqué, désinfecta­nt en main. A ses côtés, une feuille d’identifica­tion facultativ­e où figurent déjà de nombreux noms.

Restaurate­urs menacés de faillite, propriétai­res de bar qui craignent de ne pas réussir à faire respecter les distances de sécurité: après deux mois d’arrêt forcé, le monde de la restaurati­on ressort profondéme­nt fragilisé. Installé en terrasse au Bourg-de-Four autour d’un café matinal, le président du Conseil d’Etat genevois, Antonio Hodgers, ne cache pas son inquiétude: «La crise économique risque d’être encore plus dure à gérer politiquem­ent que la crise sanitaire. Nous entrons dans une phase difficile qui demandera du courage, un effort collectif pour se relever.»

«Si la clientèle n’est pas au rendez-vous, nous allons perdre pied» NOLA CARTOLIN, GÉRANTE DU GREEN CAFÉ

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