L’importance d’une décrue fiscale pour une vraie reprise
Parmi les nombreuses idées pour faciliter la reprise économique après le choc dramatique de la crise épidémiologique actuelle, il en est une qui risque d’être omise: la refocalisation de l’Etat et la baisse parallèle des coûts d’extraction de ses dépenses. Le confinement a été révélateur du rôle du travail productif, des échanges et de l’épargne pour la prospérité: le bien-être durable de la société n’a pas d’autre source. Cela passe par l’offre de biens et de services qui répondent aux attentes des consommateurs à travers l’entrepreneuriat sur les marchés.
Il faut donc favoriser cette création de valeur en la dépénalisant fiscalement. Au mieux en réduisant d’abord l’impôt sur les bénéfices et le capital des entreprises à zéro: cette imposition contribue à la dispersion des collectivités, étant donné que la charge en incombe indirectement aux personnes physiques, qu’il s’agisse des employés, des clients, des fournisseurs, et dans une moindre mesure des actionnaires de l’entreprise. L’imposition des entreprises est de loin la plus dommageable pour l’emploi et les salaires, car elle grève directement du capital productif destiné à être réinvesti dans des activités commerciales et l’innovation de produits ou de processus.
La deuxième mesure à envisager est l’abolition, due depuis plus de 70 ans, de l’impôt fédéral direct. Cette anomalie du système fiscal suisse, introduite à l’origine provisoirement pour faire face à l’effort de défense durant les guerres mondiales, contribue de façon disproportionnée au gonflement problématique de la Confédération. En renonçant à cet impôt, l’Etat central pourrait enfin se consacrer sur ses quelques tâches légitimes et réévaluer la taille de son administration pléthorique. Par exemple, l’Office fédéral de la santé publique, à lui seul, compte 600 fonctionnaires, qui n’ont ni anticipé ni préparé de réponse appropriée d’atténuation de la crise sanitaire, en dépit d’une loi, d’un plan et d’une commission extraparlementaire dédiés aux épidémies.
A titre additionnel, la suppression de la TVA sur les produits de première nécessité augmenterait le pouvoir d’achat des ménages en difficulté. La totalité de ces mesures fiscales – réduction à zéro de l’imposition des entreprises, abrogation de l’impôt fédéral direct et suppression ciblée de la TVA sur les produits de première nécessité – représenterait une décrue fiscale de l’ordre de 45 milliards de francs, dont 33 milliards de francs au niveau fédéral, soit un peu moins d’un quart des recettes fiscales totales (environ la moitié des recettes de la Confédération).
Cet investissement dans l’avenir serait de loin le plus intelligent que l’on puisse réaliser: il restituerait des ressources au secteur privé en fonction de choix individuels et de calculs économiques entrepreneuriaux, réduisant d’autant le gaspillage inhérent à la dépense politique et bureaucratique.
Simultanément, les budgets fédéraux devraient être allégés, notamment en relevant l’âge de référence de l’AVS à 70 ans, puis progressivement à 75 ans. Sur sept décennies, l’espérance de vie moyenne a progressé de 67 à 83 ans, tandis que la pénibilité et les risques du travail, dans une société de services et du savoir, continuent de diminuer et que l’état de santé s’améliore. Une période de rente aussi longue après la vie active ne se justifie que par l’immobilisme institutionnel d’un système redistributionniste mal conceptualisé à la base. Le rétablissement de l’AVS en tant qu’assurance pour le vieil âge en complément des revenus et de la fortune privés serait une réforme bénéfique à plus d’un égard: non seulement elle permettrait de supprimer les subventions de la Confédération à l’AVS (plus d’un quart des rentes annuelles de quelque 45 milliards de francs), mais renforcerait l’économie en évitant le départ précoce à la retraite d’un personnel qualifié et expérimenté.
Enfin, pour aider davantage les ménages, et en particulier les familles, l’assurance maladie devrait être concentrée sur les grands risques pour réduire son coût. La mutualisation excessive des dépenses de santé est reconnue comme la première cause de l’explosion des primes d’assurance maladie. Les actes inutiles de surmédicalisation qui découlent des mauvaises incitations actuelles sont estimés jusqu’à un tiers des dépenses. Pour permettre le développement de solutions meilleur marché, l’assurance maladie devrait se concentrer sur les maladies graves et chroniques, ce qui encouragerait également une meilleure conscience des comportements à risque et la prévention. Les dépenses courantes de santé pourraient être financées à travers des comptes d’épargne santé individuels complètement défiscalisés et restant la propriété de leurs titulaires.
Même s’il n’existe pas de panacée «parfaite» à une situation complexe et plurale, la crise exceptionnelle actuelle nécessite avant tout de libérer des énergies et des ressources productives en vue de la reprise, dans l’intérêt des jeunes générations et de leurs perspectives.
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Il faut favoriser cette création de valeur en la dépénalisant fiscalement