LE «VRAI» DU «FAUX»
Ainsi donc, on apprend dans «Le Temps» du 13 mai que Facebook s’apprête à lancer des opérations de fact-checking en Suisse romande en collaboration avec l’agence de presse Keystone-ATS. En cause notamment, le nombre d’infos erronées relayées sur le réseau social à propos du coronavirus; il s’agirait de les dénoncer et «dans certains cas» de les supprimer. Il y a de quoi trouver cette manoeuvre à la fois absurde, inefficace et inquiétante.
Absurde, parce que dans une démocratie libérale, il ne devrait pas être interdit de dire des conneries, tant que ce ne sont pas des insultes ou diffamations publiques. Inefficace, parce que le meilleur moyen de lutter contre le n’importe quoi est justement la discussion, le débat, la confrontation d’opinions diverses, et non leur censure. Inquiétante, enfin, parce que tout cela ressemble fort à un début de contrôle de l’information et des opinions – un glissement totalitaire déjà palpable en France.
Que Facebook, en tant qu’entreprise privée, se réserve le droit de poser des conditions au contenu qui est produit sur sa plateforme n’est pas en cause ici; le problème est de laisser à un organisme médiatique la décision de ce qui est «vrai» ou «faux». De là à l’interdiction de remettre en cause la parole sacro-sainte de l’Etat et des communiqués officiels, il n’y a qu’un pas. Pire, la population ne semble pas s’en émouvoir. La Boétie nous aura avertis sur la servitude volontaire… mais qui lit encore les classiques?