Et d’autres lectures estivales
Les particularités du patois jurassien décryptées par Florian Fischbacher; notre page Hyperlien en mode estival; l’été 1940 à Marseille; les mots fléchés; le sudoku; et une rencontre avec Lorenz Furrer et Andreas Hugi, deux lobbyistes qui ont fondé une des agences de relations publiques les plus influentes du pays et qui ont récemment été attaqués par les partisans de l’initiative «Pour des multinationales responsables».
Le canton du Jura est une des trois seules régions de Suisse romande qui disposent d'une poche vivante de locuteurs de patois. Parmi eux, Maurice Jobin, président de la Fédération des patoisants du canton du Jura, qui l'a appris chez ses grands-parents durant les vacances scolaires. Cette langue, qui rassemble près de 600 personnes au sein de diverses amicales et attire chaque année près de 2000 curieux pour une série de spectacles en patois, est toutefois singulière en Suisse. Il s'agit en effet d'un dialecte apparenté au franc-comtois, lui-même rattaché, comme le français d'ailleurs, aux langues d'oïl qui étaient parlées jusqu'en Wallonie. Alors que tous les autres parlers romands sont issus d'un idiome gallo-roman déjà évoqué dans les précédents épisodes de cette chronique: le franco-provençal.
La frontière dialectale s'est établie aux alentours du XVIe siècle, lorsque la progression du franc-comtois vers le sud a été freinée, notamment lorsque «l'adhésion du Jura sud à la Réforme [a] pratiquement fait cesser tous les échanges humains entre les deux parties du Jura», écrit le dialectologue Andres Kristol. La limite entre les deux zones linguistiques, située dans la région de Moutier, est d'ailleurs diffuse, et les patois qui s'y parlaient jusqu'au XIXe siècle étaient en fait des langues intermédiaires.
Si, aujourd'hui, quelques Ajoulots, ou Aidjolats, peuvent encore dire: «L’patois, çât l’langaidge qu’i comprens l’meus», difficile d'affirmer en revanche que les patoisants suisses sont en mesure de converser entre eux.
De fait, «avec les Valaisans, ou les Fribourgeois, on ne se comprend pas, alors qu'on trouve des similitudes avec la langue que parlent certains Alsaciens, par exemple», indique Maurice Jobin. Cette différence ne l'empêche pas de se réjouir de l'organisation à Porrentruy, en septembre 2021, d'une Fête internationale des patoisants où chacun sera heureux de célébrer son dialecte, qu'il soit compris ou non.
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Prochain épisode le vendredi 21 août