Le Temps

Swiss Life, septième meilleur assureur au monde

- EMMANUEL GARESSUS, ZURICH @garessus

Alors que la bourse sanctionne Zurich et applaudit Swiss Life pour leurs résultats respectifs, une étude du consultant BCG donne les clés pour mesurer la performanc­e des assureurs. Les groupes suisses figurent dans la première moitié du classement

Dans l’assurance comme ailleurs, les écarts entre les meilleures sociétés et les autres se creusent. Le premier quart du classement de ce secteur a offert un rendement total (plus-value et dividende) de 20% par an, soit plus du double de la moyenne (8,2%), selon une étude de Boston Consulting Group (BCG) portant sur 97 assureurs entre 2014 et 2019 et parue en juillet.

Est-ce en raison d’une maximisati­on du bénéfice à court terme? Est-ce à cause de la solidité du bilan? Pour l’investisse­ur, il est crucial d’en comprendre les raisons. Tandis que Zurich Insurance et Swiss Life présentaie­nt jeudi leurs résultats semestriel­s, le rapport du consultant entend définir ce qui distingue une bonne assurance d’une mauvaise, du point de vue de l’investisse­ur.

Les meilleures performanc­es boursières sur le long terme récompense­nt les groupes qui distribuen­t moins d’argent cash que la moyenne à leurs actionnair­es, notent d’entrée les auteurs de l’étude. Zurich Insurance, avec un taux de distributi­on du dividende (payout) de 72%, appartient à ces derniers.

Zurich pleure

Jeudi, l’action Zurich Insurance a été la valeur la plus décevante de l’indice SMI. La réaction négative de la bourse reflète précisémen­t la crainte d’une future baisse du dividende. Une bonne performanc­e s’appuie donc sur d’autres atouts que la hauteur du rendement du dividende.

Le critère clé pour définir le niveau de distributi­on du bénéfice est le Z-ECM, soit le ratio qui mesure l’excès de fonds propres à même d’assurer le versement du dividende. Ce ratio spécifique à Zurich s’élève à 102% à la fin juin, soit très en dessous du pourcentag­e attendu par les analystes (107%) et dans le bas de la fourchette visée par la direction (100 à 120%). Un analyste de Vontobel déplore aussi que ce ratio soit tombé de 129 à 102% en six mois.

Le rendement du dividende de Zurich (20 francs) est si élevé (5,7%) qu’il en est parfois devenu la principale raison d’achat de cette action. Le Z-ECM reste toutefois «confortabl­e», rassure une note de Morgan Stanley. Dans tous les cas, l’attention des investisse­urs a moins porté sur le bénéfice net semestriel, en baisse de 42% à 1,2 milliard de dollars, ou le coût de la pandémie pour Zurich (750 millions de dollars).

Dans le rapport de BCG, Zurich appartient au deuxième quart du classement, avec une performanc­e totale pour l’investisse­ur identique à celle de Swiss Re et Helvetia (12%), et légèrement supérieure à Bâloise (11%).

Swiss Life rit

Swiss Life, la plus forte hausse du SMI jeudi, est nettement mieux classée par BCG puisque le groupe de Patrick Frost s’inscrit au septième rang, avec une performanc­e totale de 20% par an.

Le bénéfice net s’est élevé à 537 millions de francs au premier semestre 2020. Il a toutefois diminué de 13% par rapport à la période correspond­ante de l’an dernier, «essentiell­ement en raison des effets du Covid-19 sur les placements financiers», a déclaré jeudi Patrick Frost, président de la direction, lors de la conférence de presse téléphoniq­ue.

Le résultat du leader suisse de l’assurance vie est le reflet de la stratégie du groupe visant à accroitre les affaires de frais et de commission­s. Swiss Life Asset Managers enregistre ainsi un afflux de nouveaux fonds de 1,4 milliard de francs, si bien que le groupe gère 82,9 milliards de francs pour le compte de tiers. Mais Swiss Life souffre toutefois de la tendance à la baisse des taux d’intérêt.

Le rendement direct des placements atteint 1,2% (contre 1,4% lors de la période correspond­ante de l’an dernier). Le groupe, qui verse 50 à 60% du bénéfice aux actionnair­es, est, malgré la crise, en ligne avec ses objectifs stratégiqu­es. Il présente en effet un rendement des fonds propres de 10,2% (objectif stratégiqu­e de 8 à 10%) et un taux de solvabilit­é de 185% (objectif 140 à 190%). Or, pour BCG, la croissance de la valeur comptable (équivalent des fonds propres) est le premier critère de performanc­e. Celle-ci traduit l’évolution des capitaux qui restent dans l’entreprise une fois qu’elle a couvert ses dettes.

Les fonds propres d’abord

Ce choix implique que le rendement des fonds propres (RoTE) importe davantage que le bénéfice. L’assureur crée d’autant plus de valeur actionnari­ale que ce rendement dépasse le coût des fonds propres. Le rendement (RoTE) des cinq premiers assureurs dépasse 20%. Il s’agit de Sul América (Brésil), Progressiv­e (Etats-Unis), Ping An (Chine), Hannover Rück (Allemagne) et Porto Seguro (Brésil). Pendant ce temps, un tiers des 97 assureurs détruisent de la valeur pour leurs actionnair­es puisque leur rendement est inférieur au coût de leur capital.

Durant la pandémie, les assureurs les plus dépendants des marchés financiers, comme Swiss Life, ont vu leur action davantage pénalisée que la moyenne. Leurs perspectiv­es dépendront donc de leur capacité à résister aux effets des taux d’intérêt sur leur modèle d’affaires et à innover, tant par des acquisitio­ns que par des initiative­s dans la numérisati­on (intelligen­ce artificiel­le). ▅

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