Le Temps

Barack Obama a un message pour vous

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Dans une campagne présidenti­elle aux contours toujours plus surréalist­es, la convention démocrate qui vient de se dérouler était doublement virtuelle. Parce qu’elle a pris la forme d’une succession de soirées sans public, avec des clips, vidéos préenregis­trées et directs à distance, à cause de la pandémie. Mais aussi parce qu’il fallait avoir les yeux rivés sur Twitter. Surtout mercredi soir.

Ce soir-là, Barack Obama a livré un discours puissant, passionné et dévastateu­r pour Donald Trump. Un discours qui restera dans les annales. Jamais auparavant un ancien président n’avait osé une telle charge contre son successeur. Il a ni plus ni moins accusé Donald Trump d’avoir libéré «les pires instincts» de l’Amérique et de porter un coup de massue à sa «fière réputation». «Nos institutio­ns démocratiq­ues sont menacées comme jamais auparavant», a-t-il asséné. Qu’a fait Donald Trump? Piqué au vif, il a, en pleine diffusion du discours, tweeté. Puis tweeté encore. En lettres capitales, s’il vous plaît. Il a notamment accusé Barack Obama de l’avoir «espionné» pendant la campagne de 2016. La veille, agacé par les propos de Michelle Obama, Donald Trump avait qualifié l’administra­tion ObamaBiden de «plus corrompue de l’histoire».

En pleine diffusion du discours, Donald Trump a tweeté et retweeté en lettres capitales

Cette perte de sang-froid, ces gesticulat­ions sur les réseaux sociaux contrasten­t avec le ton de Barack Obama, calme et percutant. On pourrait croire le démocrate animé par un esprit de vengeance, Donald Trump s’étant escrimé ces quatre dernières années à défaire chaque maillon de son héritage. Mais il est surtout porté par le devoir de défendre les institutio­ns. Le lieu choisi pour son discours n’avait rien d’anodin: il était au Musée de la révolution de Philadelph­ie, la ville où a été rédigée la Constituti­on des Etats-Unis. Plus question de rester au-dessus de la mêlée, de respecter ce fameux droit de réserve que s’imposent les anciens présidents. S’il descend dans l’arène, c’est parce que l’heure est grave, que la «démocratie est en jeu».

«J’ai espéré, pour le bien de notre pays, que Donald Trump puisse montrer un certain intérêt à prendre son rôle au sérieux, qu’il puisse finir par ressentir le poids de la charge et découvrir une certaine vénération pour la démocratie qui avait été placée sous sa garde», a-t-il déclaré. «Mais cela ne s’est jamais produit.» Avec le coup de guillotine: «Depuis près de quatre ans maintenant, il n’a manifesté aucun intérêt à accomplir cette tâche […], aucun intérêt à traiter la présidence comme autre chose qu’une émission de téléréalit­é, qu’il peut utiliser pour attirer l’attention dont il a besoin.» Ou encore: «Cette administra­tion a montré qu’elle détruira notre démocratie si elle doit en passer par là pour gagner. Ne les laissez pas se saisir de votre pouvoir. Ne les laissez pas confisquer votre démocratie.»

Alors que Donald Trump évoque déjà une «élection truquée», et qu’il vient d’apporter son soutien aux adeptes de QAnon, un sombre mouvement complotist­e – «Ils aiment notre pays» –, une phrase revient dans les esprits. Celle de l’ex-First Lady Michelle Obama, prononcée lors de la convention de 2016: «When they go low, we go high» («Quand ils s’abaissent, nous nous élevons»). Elle aurait pu devenir le slogan officiel de la convention démocrate cuvée 2020.

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VALÉRIE DE GRAFFENRIE­D

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