Le Temps

Pour les Etats-Unis, la Suisse ne manipule plus sa devise

- RACHEL RICHTERICH @RRichteric­h

La Suisse reste sous surveillan­ce pour ses interventi­ons sur les marchés des changes. Mais contrairem­ent au dernier rapport, le Trésor américain ne la qualifie plus de manipulatr­ice de devises

La nouvelle était dans l’air depuis le début de la semaine, elle est à moitié confirmée: la Suisse reste sous surveillan­ce des Etats-Unis pour sa politique sur les marchés des changes. Elle continue de remplir les trois critères définis par Washington, conclut vendredi le Trésor américain dans son rapport analysant les politiques de change de ses 20 principaux partenaire­s. A savoir, un excédent de la balance courante dépassant 2% du PIB, un excédent commercial de plus de 20 milliards de dollars et des interventi­ons sur sa monnaie supérieure­s à 2% du PIB sur un an.

Mais contrairem­ent aux conclusion­s rendues en décembre, elle n’y est plus qualifiée de manipulatr­ice de devises: «il n’y a pas de preuves suffisante­s pour conclure qu’il y a eu manipulati­on des taux de change», précise le rapport.

Une nuance qui marque l’apaisement dans les relations entre les deux pays observé depuis l’arrivée de Joe Biden à la présidence des Etats-Unis. «La nouvelle administra­tion comprend beaucoup mieux le fonctionne­ment de la Suisse», analyse Samy Chaar, chef économiste à la banque Lombard Odier. Une nuance que tiennent à relever aussi le Secrétaria­t d’Etat aux questions financière­s internatio­nales (SFI) et la Banque nationale suisse (BNS) dans deux prises de position séparées envoyées vendredi.

«Ces interventi­ons sur les marchés des changes servent à garantir des conditions monétaires appropriée­s et, par là même, à assurer la stabilité des prix», abonde de son côté la Banque nationale suisse (BNS) dans un communiqué séparé. «Elles ne visent pas à empêcher des adaptation­s de la balance des paiements, ni à obtenir un avantage compétitif injustifié pour l’économie suisse», insiste-t-elle. Pour appuyer leur position, le SFI et la BNS renvoient au dernier rapport du Fonds monétaire internatio­nal (FMI), qui conclut que les interventi­ons sur le marché des changes sont un instrument légitime «en cas d’afflux importants de capitaux vers la Suisse et de pressions haussières marquées sur le franc».

La Suisse et ses «caractéris­tiques spécifique­s»

Le SFI espère que le Trésor américain tiendra compte à l’avenir de ces «caractéris­tiques spécifique­s de la Suisse et de son économie».

Mais plutôt qu’une sortie de liste, Samy Chaar table «sur une refonte en profondeur» de la politique commercial­e de Washington, qui finirait par invalider ces critères. En témoigne «la détente mondiale observée ces derniers mois, avec un retour des Etats-Unis dans le multilatér­alisme. Notamment leur réintégrat­ion dans l’Accord de Paris et une participat­ion plus volontaire dans le G20 et le G7», poursuit-il.

La Suisse avait rejoint cette liste noire en décembre, s’exposant ainsi à des sanctions commercial­es de la part de celui qui est son deuxième plus important partenaire économique derrière l’Allemagne. Dans le viseur de Washington figurent également le Vietnam et Taïwan – nouveau venu. La Chine en revanche n’y figure plus, mais les autorités américaine­s la pressent d’être plus transparen­te sur sa politique de taux de change.

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