Pour les Etats-Unis, la Suisse ne manipule plus sa devise
La Suisse reste sous surveillance pour ses interventions sur les marchés des changes. Mais contrairement au dernier rapport, le Trésor américain ne la qualifie plus de manipulatrice de devises
La nouvelle était dans l’air depuis le début de la semaine, elle est à moitié confirmée: la Suisse reste sous surveillance des Etats-Unis pour sa politique sur les marchés des changes. Elle continue de remplir les trois critères définis par Washington, conclut vendredi le Trésor américain dans son rapport analysant les politiques de change de ses 20 principaux partenaires. A savoir, un excédent de la balance courante dépassant 2% du PIB, un excédent commercial de plus de 20 milliards de dollars et des interventions sur sa monnaie supérieures à 2% du PIB sur un an.
Mais contrairement aux conclusions rendues en décembre, elle n’y est plus qualifiée de manipulatrice de devises: «il n’y a pas de preuves suffisantes pour conclure qu’il y a eu manipulation des taux de change», précise le rapport.
Une nuance qui marque l’apaisement dans les relations entre les deux pays observé depuis l’arrivée de Joe Biden à la présidence des Etats-Unis. «La nouvelle administration comprend beaucoup mieux le fonctionnement de la Suisse», analyse Samy Chaar, chef économiste à la banque Lombard Odier. Une nuance que tiennent à relever aussi le Secrétariat d’Etat aux questions financières internationales (SFI) et la Banque nationale suisse (BNS) dans deux prises de position séparées envoyées vendredi.
«Ces interventions sur les marchés des changes servent à garantir des conditions monétaires appropriées et, par là même, à assurer la stabilité des prix», abonde de son côté la Banque nationale suisse (BNS) dans un communiqué séparé. «Elles ne visent pas à empêcher des adaptations de la balance des paiements, ni à obtenir un avantage compétitif injustifié pour l’économie suisse», insiste-t-elle. Pour appuyer leur position, le SFI et la BNS renvoient au dernier rapport du Fonds monétaire international (FMI), qui conclut que les interventions sur le marché des changes sont un instrument légitime «en cas d’afflux importants de capitaux vers la Suisse et de pressions haussières marquées sur le franc».
La Suisse et ses «caractéristiques spécifiques»
Le SFI espère que le Trésor américain tiendra compte à l’avenir de ces «caractéristiques spécifiques de la Suisse et de son économie».
Mais plutôt qu’une sortie de liste, Samy Chaar table «sur une refonte en profondeur» de la politique commerciale de Washington, qui finirait par invalider ces critères. En témoigne «la détente mondiale observée ces derniers mois, avec un retour des Etats-Unis dans le multilatéralisme. Notamment leur réintégration dans l’Accord de Paris et une participation plus volontaire dans le G20 et le G7», poursuit-il.
La Suisse avait rejoint cette liste noire en décembre, s’exposant ainsi à des sanctions commerciales de la part de celui qui est son deuxième plus important partenaire économique derrière l’Allemagne. Dans le viseur de Washington figurent également le Vietnam et Taïwan – nouveau venu. La Chine en revanche n’y figure plus, mais les autorités américaines la pressent d’être plus transparente sur sa politique de taux de change.
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