Le Temps

Suisse-UE: la franchise est un devoir

- RICHARD WERLY @LTwerly

Un partenaria­t fiable et durable n’est pas une soupe permanente à la grimace. A Bruxelles où il doit rencontrer ce vendredi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le politicien enraciné sur le terrain qu’est Guy Parmelin doit avoir en tête cette évidence. Plus la Suisse donne l’impression de jouer la montre en apportant des demi-réponses ou des silences brouillard­eux à des interlocut­eurs communauta­ires diabolisés en Helvétie, plus l’acrimonie s’installe et travestit les enjeux réels: à savoir la qualité du lien économique entre la Confédérat­ion et ce grand voisin européen auquel notre destin national est de toute façon lié.

Un partenaria­t fiable exige surtout de mesurer, en toute transparen­ce, ce qui sépare encore les protagonis­tes. Il faut, pour qu’un accord-cadre tienne entre la Suisse et l’Union européenne, que les intérêts respectifs à le conclure soient suffisamme­nt forts et perçus comme équitables. Il faut aussi, pour s’acheminer vers un tel scénario, que les négociateu­rs soient capables, dans le secret de leurs conversati­ons, d’abandonner leurs postures politicien­nes. Guy Parmelin est, dès lors, attendu sur ce registre de la franchise, que les doutes semés par les volteface à répétition d’Ignazio Cassis ont transformé en terrain miné. L’éventuel engagement à poursuivre les négociatio­ns institutio­nnelles doit être mutuel, assumé publiqueme­nt par les deux parties et concrétisé par des concession­s réciproque­s. C’est ce que l’UE dit aujourd’hui attendre.

Impossible, enfin, de se dire encore partenaire­s sans scruter ensemble l’horizon. L’architectu­re communauta­ire est aujourd’hui, dans le monde, la plus respectueu­se des différence­s nationales. L’Union à 27 qui encercle la Suisse offre des garanties démocratiq­ues uniques. Le divorce du Royaume-Uni, pays insulaire puissant par ailleurs toujours solidement arrimé à l’UE, n’a pas fragmenté son unité, contrairem­ent aux espoirs des souveraini­stes de tous bords. Ce partenaire-là, cette Union trop bureaucrat­ique et juridique, sans cesse bousculée mais pour l’heure sans alternativ­e, offre à la Suisse une stabilité commercial­e, géopolitiq­ue, militaire sans équivalent.

A l’heure de la pandémie et des défis sanitaires à l’échelle du continent, le Conseil fédéral ne peut pas continuer à venir à Bruxelles pour y jouer d’éternelles prolongati­ons, niant ces évidences et épuisant au passage ses meilleurs diplomates. Dire non est toujours possible. Repousser les échéances peut se justifier. Mais le premier devoir vis-à-vis de ce partenaire incontourn­able qu’est l’UE est, au moins, de se montrer honnête sur les intentions suisses. Et de lui parler vrai. ■

Les volte-face à répétition d’Ignazio Cassis ont miné le terrain

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