Suisse-UE: la franchise est un devoir
Un partenariat fiable et durable n’est pas une soupe permanente à la grimace. A Bruxelles où il doit rencontrer ce vendredi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le politicien enraciné sur le terrain qu’est Guy Parmelin doit avoir en tête cette évidence. Plus la Suisse donne l’impression de jouer la montre en apportant des demi-réponses ou des silences brouillardeux à des interlocuteurs communautaires diabolisés en Helvétie, plus l’acrimonie s’installe et travestit les enjeux réels: à savoir la qualité du lien économique entre la Confédération et ce grand voisin européen auquel notre destin national est de toute façon lié.
Un partenariat fiable exige surtout de mesurer, en toute transparence, ce qui sépare encore les protagonistes. Il faut, pour qu’un accord-cadre tienne entre la Suisse et l’Union européenne, que les intérêts respectifs à le conclure soient suffisamment forts et perçus comme équitables. Il faut aussi, pour s’acheminer vers un tel scénario, que les négociateurs soient capables, dans le secret de leurs conversations, d’abandonner leurs postures politiciennes. Guy Parmelin est, dès lors, attendu sur ce registre de la franchise, que les doutes semés par les volteface à répétition d’Ignazio Cassis ont transformé en terrain miné. L’éventuel engagement à poursuivre les négociations institutionnelles doit être mutuel, assumé publiquement par les deux parties et concrétisé par des concessions réciproques. C’est ce que l’UE dit aujourd’hui attendre.
Impossible, enfin, de se dire encore partenaires sans scruter ensemble l’horizon. L’architecture communautaire est aujourd’hui, dans le monde, la plus respectueuse des différences nationales. L’Union à 27 qui encercle la Suisse offre des garanties démocratiques uniques. Le divorce du Royaume-Uni, pays insulaire puissant par ailleurs toujours solidement arrimé à l’UE, n’a pas fragmenté son unité, contrairement aux espoirs des souverainistes de tous bords. Ce partenaire-là, cette Union trop bureaucratique et juridique, sans cesse bousculée mais pour l’heure sans alternative, offre à la Suisse une stabilité commerciale, géopolitique, militaire sans équivalent.
A l’heure de la pandémie et des défis sanitaires à l’échelle du continent, le Conseil fédéral ne peut pas continuer à venir à Bruxelles pour y jouer d’éternelles prolongations, niant ces évidences et épuisant au passage ses meilleurs diplomates. Dire non est toujours possible. Repousser les échéances peut se justifier. Mais le premier devoir vis-à-vis de ce partenaire incontournable qu’est l’UE est, au moins, de se montrer honnête sur les intentions suisses. Et de lui parler vrai. ■
Les volte-face à répétition d’Ignazio Cassis ont miné le terrain