Après le désastre, exorciser l’angoisse
Les avertissements des météorologues étaient pourtant clairs. Mais la coordination et le système d'alerte n'ont pas été à la hauteur
Alors que les eaux se retirent et que les opérations de déblayage sont en cours, une question résonne fortement outreRhin: quelle est la responsabilité de l’Etat fédéral et des autorités politiques des Länder de Rhénanie-Palatinat et de Rhénanie-du-Nord-Westphalie précités dans le tragique bilan humain (165 morts) de la catastrophe?
Vice-président de la fraction des libéraux (FDP) au Bundestag, Michael Theurer compte parmi les voix les plus critiques: «Les alertes des météorologues n’ont pas suffisamment été communiquées aux citoyens par les autorités et par les radios publiques.» Il estime que le ministre allemand de l’Intérieur, Horst Seehofer, a une responsabilité personnelle. Selon la candidate verte à la Chancellerie, Annalena Baerbock, le système d’alerte doit être amélioré et plus centralisé. Une hypothèse que certains refusent catégoriquement. Elle le précise toutefois: «Il n’est pas question de devoir choisir entre la prévention (face aux catastrophes), l’adaptation des infrastructures et la protection (des populations). Les trois aspects sont importants.»
«Quelque chose n'a pas fonctionné»
La voix la plus critique est venue de la Britannique Hannah Cloke, professeure d’hydrologie à l’Université de Reading, qui s’est exprimée dans le Sunday Times. L’universitaire, qui a codéveloppé le système européen d’alerte aux inondations (EFAS), le déplore: «Le fait que des populations n’ont pas été évacuées et qu’elles n’aient pas reçu les alertes montre que quelque chose n’a pas fonctionné.» Il est difficile de prétendre que les dirigeants politiques n’étaient pas au courant de ce qui pouvait se passer. Neuf jours avant la catastrophe, des images satellites indiquaient déjà le risque d’inondations. Quatre jours avant, l’EFAS avertissait le gouvernement allemand de crues du Rhin et de la Meuse. Vingt-quatre heures avant ont pu être identifiés les districts qui allaient être touchés.
Directeur de l’Office fédéral allemand de la protection civile et d’aide en cas de catastrophe, Armin Schuster réfute le gros des critiques: «Nous avons envoyé 150 alertes par le biais de nos applications et par les médias.» Il reste toutefois toute une partie de la population qui ne peut être atteinte par le biais d’applications. Et manifestement, les sirènes n’ont pas suffi. Le gouvernement Merkel a du coup promis d’améliorer le système d’alerte catastrophe.
L’un des problèmes est institutionnel. Si la protection civile est de la compétence fédérale, la protection contre les catastrophes est du ressort des Länder. Après la réunification allemande, le désengagement fédéral s’est accentué. En Rhénanie-du-Nord-Westphalie, le Land dirigé par le candidat à la succession d’Angela Merkel, Armin Laschet, aucun état-major de crise n’a été mis sur pied. La coordination entre les Länder a été médiocre. A l’avenir, des défis d’aménagement devront aussi être relevés: création de bassins de rétention, interdiction de construire et d’habiter certaines zones inondables.
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