«Passe sanitaire»: Macron encadre le débat
Le président français estime qu’une majorité de l’opinion est de son côté sur la vaccination. Le projet de loi, approuvé lundi en Conseil des ministres, sera voté en une semaine
Tous ceux qui déplorent les pouvoirs de contrôle limités du parlement français auront, cette semaine, une nouvelle occasion de plaider pour une VIe République. Pressé de tourner la page de la pandémie, qui a déjà coûté à l’Etat près de 200 milliards d’euros en aides, prêts ou mesures de soutien à l’économie au nom du «quoi qu’il en coûte», Emmanuel Macron entend faire adopter en «accéléré» le projet de loi sur le «passe sanitaire» dès cette fin de semaine.
En clair: quelques jours de débat parlementaire (mardi et mercredi à l’Assemblée nationale où la majorité présidentielle aura le dernier mot législatif, jeudi et vendredi au Sénat contrôlé par l’opposition de droite) et une décision finale attendue au plus tard dimanche. Le Conseil constitutionnel se prononcera ensuite.
Un fonctionnement républicain «TGV» dont le président français suivra le déroulement à distance puisqu’il s’envolera jeudi pour Tokyo afin d’assister à l’ouverture des Jeux olympiques le 23 juillet, avant de mettre le cap sur la Polynésie du 24 au 28.
Côté calendrier de mise en oeuvre des nouvelles mesures sanitaires contraignantes pour les non-vaccinés, l’objectif est que le nouvel arsenal de contrôles et de sanctions – de 1500 jusqu’à 9000 euros d’amende dans le projet de loi pour les restaurateurs qui ne vérifieront pas le statut vaccinal de clients – soit complètement en place au 1er août.
Tous les lieux de loisirs ou de culture concernés
Dès ce 21 juillet, tous les lieux de loisirs ou de culture sont concernés lorsque leur fréquentation dépasse 50 personnes. Début août, le «passe sanitaire» sera également exigé avant de s’installer à une table, de rentrer dans un centre commercial (règles variables selon la surface) ou d’embarquer dans un train domestique (le contrôle est déjà en vigueur pour les liaisons ferroviaires et aériennes internationales). Point encore plus important au vu du front du refus qui s’installe en France: le projet de loi pourrait imposer une vérification par les opérateurs – exploitants de restaurants, discothèques, contrôleurs dans les trains – alors que seules les forces de l’ordre ont aujourd’hui ce droit. L’autre partie du projet de loi concernera la vaccination obligatoire pour les soignants et les aidants. Emmanuel Macron a fixé pour objectif que tous soient vaccinés d’ici au 15 septembre, date à laquelle des sanctions seront appliquées. Le ministre de la Santé, Olivier Véran, l’a confirmé dimanche soir. D’autres mesures de «freinage» pourront être mises en place par les préfets si le taux d’incidence dans leur département dépasse 200 cas pour 100000 habitants.
69% pour la vaccination obligatoire
Pour la partie pédagogique, la responsabilité reviendra au premier ministre, Jean Castex, qui a déjà assumé ce rôle en intervenant plusieurs fois à la télévision lors des périodes de confinement. L’ironie de la situation est que celui-ci est directement concerné par la reprise des contaminations: les Pyrénées-Orientales, son département d’origine – où se trouve la commune de Prades dont il était maire avant son arrivée à Matignon – est «rouge» après avoir dépassé les 300 cas pour 100000 habitants. Les restaurants, y compris sur les plages, doivent fermer à 23h et le masque y est de nouveau obligatoire partout en extérieur.
Ce jeu de rôle avec Jean Castex est calculé. Il permet à Emmanuel Macron de demeurer au-dessus de la mêlée, et d’apparaître comme celui qui fixe le cap à une population française majoritairement d’accord avec la nécessité de se faire vacciner. Selon un sondage de la radio France Info, 69% des Français sont d’accord avec la vaccination obligatoire; 62% sont pour l’imposition du passe sanitaire et 63% pour la fin de la gratuité des tests de dépistage.
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