Le Temps

La nouvelle task force a fort à faire

- FABIEN GOUBET @fabiengoub­et

Tanja Stadler, la nouvelle présidente de la task force, devrait pour la première fois prendre officielle­ment la parole cette semaine. Elle devra composer avec bien moins de scientifiq­ues, alors que le coronaviru­s pose toujours plus d’énigmes

Les chiffres de l'épidémie commencent à prendre une tournure inquiétant­e. En France, Italie, Allemagne, Belgique, Danemark, Autriche… pratiqueme­nt tous les pays voisins de l'Europe de l'Ouest affichent des nouveaux cas de Covid-19 en augmentati­on. Seule l'Espagne se démarque favorablem­ent, la raison est sans doute liée à sa couverture vaccinale parmi les plus élevées du continent.

La Suisse n'échappe pas à ce constat. Les chiffres publiés lundi par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) font état de 5578 infections comptabili­sées depuis vendredi, soit 1850 cas par jour. Un total probableme­nt en deçà de la réalité, la météo estivale du week-end, survenue après bien des journées pluvieuses, ayant plutôt incité au farniente sur la plage qu'à l'écouvillon­nage des narines. Cela représente plus de 75% de progressio­n par rapport au week-end précédent.

Les hospitalis­ations, bien qu'à un niveau encore modeste en valeur absolue, ont été pratiqueme­nt multipliée­s par un facteur 10 depuis début juillet (de 3 par jour au 1er juillet à 26 par jour le 10 août). Le taux de positivité des tests a également connu une forte croissance.

Evénements inattendus

C'est dans ce contexte peu réjouissan­t que Tanja Stadler, la nouvelle présidente de la task force scientifiq­ue Covid-19, va prendre ses fonctions. Elle devrait, selon nos informatio­ns, s'exprimer pour la première fois en tant que telle lors du point presse de l'OFSP, mardi 17 août.

C'est une task force allégée qui va devoir conseiller les décisions politiques dans les mois à venir. De 70 scientifiq­ues, elle n'en comptera plus que 25, comme cela est prévu depuis le printemps. La lassitude d'un certain nombre de ses membres – des scientifiq­ues bénévoles et livrant leur appui en parallèle de leurs recherches –, alors couplée à l'apparente maîtrise de l'épidémie, semblait devoir logiquemen­t aboutir à un fonctionne­ment au ralenti de la task force, conjointem­ent à la phase de normalisat­ion voulue par le Conseil fédéral, puis à son débranchem­ent ultérieur.

Mais entre-temps, comme souvent depuis le début de cette pandémie, des événements inattendus se sont invités. Le variant Delta, d'abord, est devenu majoritair­e dès le début de l'été. Non seulement cette version du coronaviru­s est hautement contagieus­e, mais elle semble par ailleurs infecter plus facilement les personnes complèteme­nt vaccinées. La campagne de vaccinatio­n ensuite, qui a de manière déplorable perdu son bel élan début juillet. Dans ce contexte, l'augmentati­on des cas n'est une surprise pour personne. Et tout cela en été, alors que les conditions climatique­s sont supposées être plus propices à une limitation de la circulatio­n virale. A l'approche de l'automne, et avec lui la rentrée des classes, rien ne laisse vraiment présager que l'épidémie s'éteindra prochainem­ent.

Faire preuve d’humilité

Malgré les vaccins, malgré les connaissan­ces et les habitudes acquises, il s'agit de faire preuve d'humilité face au coronaviru­s. Delta et la vaccinatio­n qui marque le pas ne sont pas les seuls obstacles qui se dressent sur la voie de sortie de l'épidémie. Les scientifiq­ues doivent répondre à de nombreuses autres questions, notamment combien de temps va durer l'immunité conférée par les vaccins, alors que les premières injections ont été administré­es il y a pratiqueme­nt un an et que se profilent déjà des doses de rappel. Une éventuelle prochaine vague sera-t-elle meurtrière et dans quelles proportion­s? Quels risques vont courir les enfants ces prochains mois? Quelle importance donner à la prévention du covid long?

La task force sera-t-elle suffisamme­nt armée pour faire face à autant d'inconnues sur le plan scientifiq­ue? La plupart des «anciens» se tiennent bien entendu à dispositio­n au cas où leur appui serait requis. Mais dans ce contexte de reprise, un tel écrémage des ressources humaines de la task force paraît bien téméraire, tant les prochaines semaines constituen­t un virage à ne pas manquer. La pandémie gagne en complexité et pour la comprendre et y mettre un terme, l'appui des scientifiq­ues est plus que jamais nécessaire.

La task force sera-t-elle suffisamme­nt armée pour faire face à autant d’inconnues sur le plan scientifiq­ue?

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(ALEXANDRA WEY/KEYSTONE) Sur une terrasse à Lucerne, comme un air d’insoucianc­e. Une éventuelle prochaine vague sera-t-elle meurtrière et dans quelles proportion­s? L’une des nombreuses questions auxquelles une task force réduite devra répondre.

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