Le Temps

Mariage civil pour toutes et tous: oui à l’évident

-

L ’amour qui pendant si longtemps «n’osait pas dire son nom» fait depuis quelques décennies partie intégrante de notre société. Partie intégrante de nos familles et de nos environnem­ents de travail, de nos cercles d’ami·es, de nos livres et de nos médias. Pour y arriver, les personnes homo- et bisexuelle­s ont dû répondre à beaucoup, beaucoup de questions. Deux personnes de même sexe peuvent-elles vraiment s’aimer, comme s’aiment deux personnes de sexe opposé? Peuventell­es vivre dans des relations stables, de longue durée, être fidèles à ce que nous avons érigé (à tort ou à raison) en objectif de vie suprême? Et la question ultime: peuvent-elles élever un enfant ensemble, un enfant qu’inévitable­ment elles n’auront pas conçu ensemble?

La réponse est oui. Oui, oui et oui. Qui le dit? Tout d’abord, les personnes concernées. D’ailleurs, leur nombre n’est pas si petit: partant de statistiqu­es actuelles, plus d’un demi-million de personnes en Suisse s’identifien­t autrement qu’hétérosexu­el et/ ou cisgenre (terme utilisé pour les personnes dont le genre ressenti correspond au genre assigné à la naissance). Ensuite, la science. Elle scrute depuis des décennies les parcours de vie des personnes LGBT (lesbiennes, gay, bi et trans) jusqu’aux derniers recoins de leur intimité. Finalement, les enfants qui ont grandi dans les familles arcen-ciel – celles où au moins un parent ne s’identifie pas comme hétérosexu­el ou cisgenre. Et si toutes ces voix ne devaient pas suffire: le parlement, le Conseil fédéral, la Commission fédérale d’éthique ainsi que d’importante­s organisati­ons et institutio­ns comme Pro Familia, Pro Juventute et de nombreuses communauté­s religieuse­s.

Malgré ce que prétendent les opposant·es, le mariage civil pour toutes et tous est un grand progrès pour le bien de l’enfant. L’accès à la procréatio­n médicaleme­nt assistée (PMA) en Suisse pour les couples de femmes mariées permet enfin de soumettre tout le monde aux mêmes règles, en particulie­r vis-à-vis du droit de l’enfant à connaître ses origines. La loi sur la procréatio­n médicaleme­nt assistée garantit et précise l’accès des enfants conçus ainsi à l’identité du donneur. Et les enfants issus d’une PMA en Suisse bénéficier­ont enfin d’une deuxième protection fondamenta­le: ils disposeron­t enfin de deux parents dès leur naissance, ce qui est un grand progrès par rapport à la situation actuelle. Pour rappel, aujourd’hui, l’adoption de l’enfant du conjoint ne peut se faire que lorsque l’enfant a 1 an, le laissant en attendant avec un seul parent légal et les risques que cela engendre. D’ailleurs, contrairem­ent à des parents hétérosexu­els, deux mères ne peuvent jamais prétendre être les deux génitrices de l’enfant.

Si l’on est véritablem­ent préoccupé par le bien de l’enfant, c’est le statu quo limitant sa protection légale qui doit être combattu. Tout en favorisant substantie­llement le bien de l’enfant en restant dans le cadre légal actuelleme­nt en vigueur, le mariage civil pour toutes et tous n’ouvre pas le débat sur d’autres moyens de procréatio­ns.

Nul besoin d’être un·e grand·e historien·ne pour se rendre compte que le mariage a subi de nombreuses révolution­s par le passé. Son ouverture aux couples de même sexe, lorsqu’on la compare, par exemple, à la généralisa­tion du mariage d’amour, représente une modificati­on relativeme­nt minime. Cette institutio­n, à l’instar de la société qui l’a produite, est en perpétuel mouvement. Partout où l’ouverture du mariage aux couples de même sexe est déjà réalité – dont les Pays-Bas, où c’est le cas depuis vingt ans –, le constat est unanime: une meilleure acceptatio­n des personnes LGBT entraîne nécessaire­ment des effets positifs pour la société dans son ensemble.

Dire «oui» au mariage civil pour toutes et tous le 26 septembre, c’est avant tout reconnaîtr­e inconditio­nnellement l’humanité des personnes LGBT. C’est célébrer le coeur même du grand et vaste principe de l’égalité, à savoir ne jamais traiter différemme­nt deux situations équivalent­es. C’est donner la même protection légale à toutes les familles et à tous les enfants.

C’est d’autant plus important que ce vote crucial aura lieu dans un contexte politique particulie­r: alors que nous discutons de cette avancée en matière d’égalité, d’autres pays du continent européen organisent en ce moment même de véritables chasses aux sorcières contre la communauté LGBT. Un oui le 26 septembre sera donc aussi un signal fort contre le déclin des droits humains.

 ??  ?? OLGA BARANOVA DIPLÔMÉE EN SCIENCES POLITIQUES ET EN MANAGEMENT PUBLIC, EST DIRECTRICE DE CAMPAGNE DU COMITÉ NATIONAL MARIAGE CIVIL POUR TOUTES ET TOUS
OLGA BARANOVA DIPLÔMÉE EN SCIENCES POLITIQUES ET EN MANAGEMENT PUBLIC, EST DIRECTRICE DE CAMPAGNE DU COMITÉ NATIONAL MARIAGE CIVIL POUR TOUTES ET TOUS

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland