Le Temps

Incertitud­es autour des prix du pain et des pâtes en Suisse

- RAM ETWAREEA @rametwaree­a

La production mondiale de blé a chuté en 2021 en raison des sécheresse­s en Amérique du Nord et des inondation­s en Europe. De quoi provoquer une flambée des prix. En Suisse, la récolte bat son plein. Les céréaliers et les boulangers sont dans l’attente des données et décideront des prix du pain vers la fin du mois

Du canton de Genève à celui de Thurgovie, la récolte de blé bat son plein en ce mois d'août. Les quelque 20 000 producteur­s sont à l'oeuvre, mais ne font pas de pronostics sur la production et encore moins sur sa qualité. En 2021, l'été, période de maturation, a été pluvieux, ce qui rend difficile toute évaluation. Une chose est tout de même sûre. Quoi qu'il en soit, les paysans toucheront le prix indicatif de 52 francs pour les 100 kilos pour la variété dite «Top». Pour les deux variétés viennent-ensuite, ce sera 50 et 49 francs par 100 kilos. En Suisse, les prix n'ont pas changé depuis 2014.

Mais ce n'est pas ainsi partout dans le monde. Le prix du blé sur le marché mondial a pris l'ascenseur ces dernières semaines à la suite d'une forte baisse des récoltes dans les principaux pays producteur­s: Canada, Europe, Russie et Ukraine. Alors que l'Amérique du Nord a connu une vague de chaleur sans précédent, l'Europe, de l'est à l'ouest, a été arrosée par des pluies torrentiel­les, provoquant des pertes de vies et de cultures. Résultats: une flambée historique des prix. Sur une année, le cours du blé tendre est passé de 177 à 250 euros la tonne et celui du blé dur, de 265 à 335 euros la tonne. Les prix se sont quelque peu repliés ces derniers jours, les marchés craignant une baisse de la demande liée à une conjonctur­e économique incertaine.

La Suisse autosuffis­ante

Dans de nombreux pays, les industriel­s (boulangeri­es, fabricants de pâtes alimentair­es) appellent à une aide d'urgence. Ce n'est pas le cas en Suisse. Selon Swiss Granum, organisati­on faîtière de la branche suisse des céréales, des oléagineux et des protéagine­ux, le pays produit 450 000 tonnes de blé et peut aussi importer jusqu'à 70 000 tonnes par année. «Le contingent de ces trois dernières années n'a pratiqueme­nt pas été utilisé, affirme son directeur Stephan Scheuner. Les récoltes indigènes successive­s étaient bonnes tant en termes de quantité que de qualité.»

En cas de surproduct­ion de blé, la Fédération suisse des producteur­s de céréales effectue un déclasseme­nt du blé panifiable en blé fourrager. «Ces dernières quatre années, 20 000 tonnes ont été déclassées, poursuit Stephan Scheuner. En 2014, année exceptionn­elle, 100 000 tonnes avaient été déclassées pour une question de qualité.»

Soit. La stabilité de la production indigène ne garantit toutefois pas une stabilité des prix du pain et des pâtes en Suisse. Car une certaine quantité de pain, souvent précuite, est importée de France et d'autres pays d'Europe de l'Est. Swissbaker, l'associatio­n des patrons boulangers-confiseurs, observe l'évolution du marché mondial. Les boulangeri­es représente­nt 25% du pain en Suisse, le reste étant assuré par les grandes surfaces (Migros, Coop, Lidl, Denner, Aldi) ainsi que par les stations d'essence.

«A ce stade, nous sommes en contact avec Swiss Granum et les meuniers en ce qui concerne les prix, déclare Claudia Vernocchi, vice-présidente de Swissbaker. A présent, nous analysons l'impact de la hausse du prix du blé sur le marché internatio­nal.» Et d'ajouter: «Nous serons, le plus tôt à la fin août, en mesure de donner des conseils à nos membres en matière de l'évolution des prix du pain. Les décisions finales appartienn­ent à nos 1400 membres qui sont des entreprene­urs qui gèrent leur entreprise.»

Migros affirme que son pain est à 98% suisse tout comme la farine en vente en magasin, tandis que les pâtes alimentair­es sont produites avec du blé dur généraleme­nt importé, du Canada ou de l'Union européenne. «Nous suivons la hausse actuelle de prix sur le marché internatio­nal en continu, déclare son porte-parole. Les produits en vente actuelleme­nt dans nos rayons sont issus de la récolte 2020, suisse ou étrangère, selon le type de produit. Et ce qui concerne l'évolution des prix, ces prochaines semaines, nous ne pouvons faire aucune prédiction ou prévision, les informatio­ns complètes de la récolte 2021 n'étant pas encore à notre dispositio­n.» A ce stade, Migros confirme qu'aucun ajustement de prix n'est prévu en raison d'éventuels changement­s du prix des matières premières.

La promesse d’Aldi

Un autre acteur, la chaîne Aldi qui a introduit un rayon boulangeri­e en 2013 et ne cesse depuis d'élargir sa gamme de pains. «Plus de 80% de notre assortimen­t provient de Suisse, répond le groupe dans une note écrite. Les articles labellisés Swiss Made, Suisse Garantie, Nature Suisse et Nature Suisse Bio utilisent des matières premières locales à 100%, les restes de produits venant de l'étranger. «Nous sommes touchés par la hausse des prix d'achat de la matière première, dit-il. Cependant, nous n'avons pas augmenté le prix de vente du pain, car notre objectif est de soutenir nos clients de la meilleure façon possible, surtout dans des périodes comme celle-ci.» Aldi affirme qu'il n'a pas l'intention de répercuter les augmentati­ons de prix sur ses clients. ■

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