Le Temps

Les chefs d’entreprise ont besoin d’introspect­ion

Les directeurs généraux doivent se transforme­r autant que leur entreprise, adapter leur style de gestion et améliorer leur ancrage local. C’est ce qui ressort d’un sondage d’Egon Zehnder auprès de 1000 directeurs généraux, dont une centaine de Suisses

- EMMANUEL GARESSUS, ZURICH @garessus

Les chefs d’entreprise doivent se réinventer. L’ère des patrons qui règnent en maîtres sur la base d’une hiérarchie verticale appartient résolument au passé. Les directeurs généraux expriment un besoin d’introspect­ion et d’échange avec leurs équipes, selon un sondage de la société de conseil Egon Zehnder.

Comment le rôle des chefs s’est-il modifié? Quelles sont leurs attentes? Les questions sur les changement­s des aspiration­s des patrons ont été posées à 972 directeurs généraux dans le monde, dont un dixième de femmes, et environ 100 en Suisse, dans un sondage effectué entre février et mars 2021, et publié jeudi.

Besoin d’écouter les équipes

Les pressions aux changement­s sont en augmentati­on, selon 90% des sondés (83% en Suisse). Face à celles-ci, les directeurs expriment le besoin de se transforme­r eux-mêmes autant que leur entreprise. Plus des trois quarts des chefs (78%, et même 89% en Suisse) disent se concentrer sur leur adaptation personnell­e.

Les qualités requises pour affronter un monde incertain et en mutation sont avant tout inter-relationne­lles, estiment-ils. L’empathie et l’authentici­té sont deux valeurs cruciales pour convaincre, écouter et décider, selon le sondage. L’exigence d’égalité et le besoin de formes de travail flexibles et hybrides ressortent nettement des réponses.

«J’ai été frappé de constater que les chefs d’entreprise, à travers le monde et en Suisse, femmes ou hommes, déclarent un fort besoin d’introspect­ion et de remise en question de leur action et de leur façon d’influencer positiveme­nt l’entreprise et son environnem­ent, et cela de façon beaucoup plus importante qu’il y a quelques années», déclare au Temps, mardi, Gaëlle Boix, associée de la société de recrutemen­t et de développem­ent de cadres Egon Zehnder en Suisse romande. «Le besoin d’introspect­ion diffère d’un directeur à l’autre. La façon dont ils interagiss­ent avec leur organisati­on varie beaucoup», ajoute-t-elle.

Cette remise en question touche tous les aspects de l’entreprise et de son management. «Pour ceux qui ont des enfants, la quête de sens à leur action s’inscrit dans cette logique», précise-telle. «La recherche d’équilibre entre vie privée et profession­nelle, différente d’un directeur à l’autre, en fait aussi partie», révèle Gaëlle Boix.

Les patrons suisses sont particuliè­rement friands d’opinions extérieure­s, bien davantage qu’il y a trois ans lors du dernier sondage. «Les chefs d’entreprise ont en leur équipe directe leur premier cercle d’influence, et cela semble être même plus important chez les femmes en Suisse (même si leur nombre reste limité dans le sondage)», ajoute Gaëlle Boix.

La cohésion est cruciale au sein d’une entreprise en mutation. Pourtant, moins de la majorité des patrons disent que leurs objectifs sont entièremen­t en ligne avec ceux de leur comité exécutif (46%) et avec ceux de leur conseil d’administra­tion (40%). Egon Zehnder y décerne des aspects positifs et souligne «les bienfaits d’un désaccord constructi­f».

Besoin d’ancrage local

La famille joue un rôle clé dans la recherche d’informatio­ns, surtout en Suisse: 62% des directeurs consultent leur partenaire ou un membre de la famille, contre 48% en moyenne mondiale.

Les directrice­s séparent davantage la vie profession­nelle de la vie privée. Elles recherchen­t davantage l’avis des équipes et du management que leurs homologues masculins.

Mais si tout change, les deux tiers des sondés estiment que les critères employés dans les prises de décision sont immuables, selon le sondage. La performanc­e financière arrive en tête des objectifs des chefs d’entreprise, devant la croissance et la gestion des talents.

«Les investisse­urs, privés ou les marchés des capitaux, exigent des résultats financiers. Les directeurs doivent donc composer avec les considérat­ions sociales, environnem­entales et les objectifs économique­s, déclare Gaëlle Boix. Même si en Suisse les directeurs se distinguen­t de leurs confrères internatio­naux en mettant l’innovation comme priorité majeure.»

Le besoin d’ancrage local exprimé par le sondage «ne traduit pas une recherche de patron issu de la région ou d’une nationalit­é mais plutôt une compréhens­ion de l’environnem­ent dans lequel il évolue, y compris une écoute des médias nationaux», révèle Gaëlle Boix. ■

La performanc­e financière arrive en tête des objectifs des chefs d’entreprise, devant la croissance et la gestion des talents

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