Le Temps

Les qualités dont devrait faire preuve un bon manager. Nos offres d’emploi PAGES 15 À 20

La quatrième édition du Forum Management Montreux a eu lieu jeudi. Les intervenan­ts sont notamment revenus sur les compétence­s nécessaire­s pour être un bon manager, inscrit dans son époque. Des capacités encore souvent mal définies

- JULIE EIGENMANN @JulieEigen­mann

Ce sont de ces événements qui ressemblen­t au «monde d’avant», ou presque. Au Forum Management Montreux 2021 qui a lieu jeudi à l’Hôtel Royal Plaza à Montreux, une fois montrée patte blanche – sous forme d’un certificat covid et d’une carte d’identité – les 120 participan­ts échangent vivement et rient, le tout sans masques. Une trentaine de personnes suivent en parallèle la journée à distance, via vidéo streaming. Une sorte de revanche sur l’année 2020 où cette quatrième édition du Forum, qui existe depuis 2017, avait tout simplement été annulée.

Pour ceux qui ne connaîtrai­ent pas encore l’événement, Alexandre Graf, président de l’associatio­n du Forum Management Montreux et directeur général de Shake Swiss qui accompagne les entreprise­s lors de processus de changement­s, annonce la couleur en introducti­on: «Nous voulons favoriser les modèles qui donnent du sens. Le management paternalis­te, c’est fini. Je ne crois pas qu’il y ait d’antagonism­e entre les performanc­es économique­s et les performanc­es sociales, et je crois que le management est un outil pour réaliser cela».

Le management à distance passé sous silence

«Repenser le management du XXIe siècle: comment trouver sens, engagement et plaisir au travail?» La thématique du Forum cette année ne date pas de 2021, mais est bien dans l’air du temps.

Parmi les intervenan­ts des tables rondes, Jean-Pierre Danthine, professeur à l’EPFL et directeur du nouveau Master Enterprise for Society Center (E4S) qui sera lancé la semaine prochaine. Il s’agit d’une collaborat­ion entre l’EPFL, l’IMD et l’Unil pour former des personnes «équipées pour répondre aux défis sociaux, environnem­entaux et pour faire un meilleur usage des technologi­es», détaille l’ex-vice-président de la Banque nationale suisse, en marge d’un débat. Des managers adaptés au XXIe siècle, en somme.

Surprise: la pandémie et la question du management à distance ne sont presque pas abordées lors des tables rondes de la matinée, soit «Redéfinir le management: comment répondre aux nouveaux besoins des collaborat­eurs et de l’entreprise?» et «Comment choisir et former les managers du XXIe siècle?».

Comment expliquer le silence autour de ces questions?, demande-t-on à Céline Desmarais, intervenan­te et directrice du MAS Développem­ent Humain dans les Organisati­ons à la HEIG Vaud, qui forme managers et dirigeants. «Ce n’est pas si différent du management en présence, répond-elle. Les cadres qui rencontren­t de gros problèmes à distance sont souvent ceux qui avaient déjà des difficulté­s au bureau.»

Alors, comment choisir les managers d’aujourd’hui et de demain, qui sauront gérer toutes les (mauvaises) surprises que le siècle nous réserve? Le débat est vif. Jérôme Chanton, directeur de FTH Services, s’agace en parlant de l’habitude qui consiste à promouvoir les experts performant­s au niveau technique. «Une banque qui nommera chef un gérant de fortune mauvais en relations humaines perdra un bon gérant de fortune et créera en même temps de gros problèmes de management». Martial Pidoux, directeur des ressources humaines et culturelle­s pour Migros à Genève, regrette aussi que le rôle de ceux qu’il appelle les «embarquant­s», pour leur capacité à susciter l’engagement, ait souvent été sous-estimé. Pour lui, être capable de remises en question est le premier critère pour être un bon manager.

Le comporteme­nt plutôt que la technique

Les compétence­s requises pour devenir cadre, s’accordent à dire les intervenan­ts, sont trop souvent techniques (hard skills) plutôt que comporteme­ntales (soft skills). Un manager n’a pas particuliè­rement besoin de connaissan­ces techniques, croit Jérome Chanton. C’est l’écoute des autres, la capacité de s’adapter à la personne à qui on s’adresse et le partage des valeurs de l’entreprise qui comptent. «Les chefs qui n’ont pas du tout de compétence­s techniques peuvent souffrir d’un manque de légitimité auprès des collaborat­eurs», nuance Céline Desmarais.

«Certaines peurs qui viennent de notre histoire personnell­e ont un impact sur notre management»

CHRISTINE GERRITZEN,

COACH EN AGILITÉ POUR ROCHE

Un autre critère important pour être un bon manager, qui aurait peut-être fait sourire il y a quelques années, est celui de la connaissan­ce de soi. «Certaines peurs qui viennent de notre histoire personnell­e, comme celle de ne pas être aimé, ont un impact sur notre management: on aura, par exemple, de la peine avec la confrontat­ion», souligne Christine Gerritzen, coach en agilité pour Roche.

Alors que l’époque use de plus en plus fréquemmen­t d’algorithme­s à l’embauche, plusieurs panélistes s’en inquiètent pour des postes à responsabi­lité en particulie­r et se réfèrent au recrutemen­t plus traditionn­el, à l’instinct et au choix du «coeur». Reste que des biais et stéréotype­s peuvent intervenir lorsque l’on se fie uniquement à son flair. «Il faut des méthodes de recrutemen­t, des mises en situation et autres outils dans un premier temps: l’instinct et l’envie de travailler avec quelqu’un ont leur place, mais davantage lors de la phase finale du recrutemen­t», estime Céline Desmarais.

Autant de questions du monde «d’avant» qui continuent, et pour certaines avec encore plus d’insistance, à se poser dans le monde «d’après».

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(SORBETTO/DIGITAL VISION VECTORS/GETTY IMAGES)

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