Le Temps

«Je pense que les risques sont faibles»

- PROPOS RECUEILLIS PAR RAPHAËL JOTTERAND t @Raph_jott NATHALIE CHÈVRE ÉCOTOXICOL­OGUE

«La Suisse est un petit territoire avec un passé et un présent industriel­s importants»

Afin de mieux comprendre les risques liés aux dioxines, l’écotoxicol­ogue Nathalie Chèvre revient sur les thématique­s abordées avec une certaine prudence, sans sous-estimer pour autant les enjeux sur le long terme

Qu’est-ce qu’une dioxine?

Les dioxines forment une famille de substances. Il en existe 210 cousins différents, qui se distinguen­t par leur quantité en chlore. Il y en a des plus toxiques que d’autres, qu’on peut reconnaîtr­e par leur facilité à pénétrer dans les matières vivantes. Une fois dans le sol, les dioxines mettent des centaines d’années avant de disparaîtr­e.

Est-ce qu’elles représente­nt un danger pour la population?

Ça dépend où elles se trouvent, dans quel compartime­nt de l’environnem­ent. Dans le sol, elles sont relativeme­nt stables et peu disponible­s. Ce qui est plus dangereux, c’est quand on retrouve des dioxines dans l’air, ce qui ne devrait plus arriver grâce aux filtres qui sont mis sur les cheminées des usines d’incinérati­on. Pour revenir au cas de Lausanne, à part une consommati­on régulière de produits terriens tels que les cucurbitac­ées ou les oeufs, je ne pense pas qu’il y ait un véritable danger.

Que conseillez-vous aux exploitant­s des jardins qui se trouvent dans les zones à risque?

Les recommanda­tions de la ville sont correctes. Il faut rincer la nourriture produite dans ces zones et éplucher les légumes. Après, tout dépend de la consommati­on de chacun. Si vous mangez deux oeufs par semaine qui proviennen­t d’un jardin potentiell­ement touché par les dioxines, à mon avis, vous ne courez pas un vrai danger. Par contre, si votre

consommati­on de produits provenant de ces zones est quotidienn­e, il faudrait mener des analyses plus poussées sur votre parcelle pour voir le taux de dioxines afin de réfléchir aux mesures à prendre.

Le taux de dioxines peut donc varier d’un jardin à l’autre?

Tout à fait. Ça dépend de l’usage qui en a été fait depuis une vingtaine d’années. Si le sol a été complèteme­nt retravaill­é avec de la nouvelle terre ou un revêtement différent, il n’y a pas de problèmes. Pareil pour les plantation­s qui sont faites dans des bacs avec de la terre achetée en magasin.

Et qu’en est-il des places de jeux?

C’est pareil. La plupart des revêtement­s ont été changés au cours des dernières années, donc le taux de dioxines devrait être très bas. Je ne veux pas minimiser le problème, mais je pense que les risques sont faibles.

Quel peut être l’impact des dioxines sur notre corps?

Tout dépend de la quantité ingérée. Ce qu’il faut comprendre, c’est que les effets des dioxines peuvent survenir sur le long terme. Elles peuvent avoir un impact sur la fertilité ou sur le développem­ent de cancers. Mais en Suisse, je n’ai pas connaissan­ce de cas qui ont eu un impact sur la santé où l’on a pu directemen­t impliquer les dioxines.

Que retenir de cette histoire?

Ce qui est très intéressan­t avec cette affaire, c’est de se rappeler que la Suisse est un petit territoire avec un passé et un présent industriel­s importants. Il existe 38000 sites contaminés en Suisse. Il est toujours difficile d’agir après que la pollution a été détectée. Par contre, lutter contre les pollutions actuelles permettra de diminuer l’impact de nos activités pour les génération­s futures.

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