Alpian devient la première banque privée numérique suisse
Une banque privée dans la poche, mais différente des autres banques de gestion de fortune. Telle est l’ambition d’Alpian, à Genève. Avec l’obtention de la licence bancaire de la part de la Finma, la start-up créée en 2019 touche au but. Dans ses bureaux de Genève, Londres et Rome, elle emploie déjà 70 collaborateurs, dont une moitié pour le développement technologique et l’autre pour l’activité opérationnelle bancaire.
Avec la licence bancaire, Alpian s’ouvre au public et pourra enfin partir à la recherche de ses clients, déclare au Temps Schuyler Weiss, cofondateur et directeur général de la banque. Le processus d’autorisation auprès de la Finma est un «investissement long mais qui permet d’assurer aux clients que leur épargne sera en bonnes mains. C’est un investissement rentable», affirme-t-il.
A la fois fintech et banque classique
Bientôt tous les établissements bancaires disposerontd’une app et seront présents sur le canal numérique. Pour s’y faire une place, Alpian joue donc la carte de l’innovation «en prenant une partie de la gestion de fortune classique, une partie de la banque classique et en numérisant le tout. Nous voulons être la première banque privée numérique suisse», indique Marion Fogli, cofondatrice et membre de la direction. Elle promet donc d’être à la fois une banque, un gestionnaire de fortune et une fintech. Paradoxalement, dans un monde que l’on dit surbancarisé, elle affirmes’adresser à des «clients actuellement sans réponse à leur problème en raison de la segmentation des services et du coût excessif des prestations».
Concrètement, le client devrait, selon Marion Fogli, pouvoir ouvrir un compte (à partir de 10000 francs) en moins de dix minutes, en quatre monnaies différentes (francs, euros, livres sterling et dollars), disposer de tarifs compétitifs pour les changes, utiliser les transferts possibles de la banque de détail et la possibilité de faire ses premiers investissements.
L’humain ne disparaît pas d’une banque 100% numérique. A l’écart d’un vaste espace ouvert qui réunit les équipes dans leur siège genevois, Schuyler Weiss dévoile l’une des cinq cabines à l’équipement moderne qui permettra un dialogue vidéo entre le gérant et le client, en toute discrétion et sécurité. Le modèle d’affaires sera orienté sur le conseil. «Nous ne voulons pas vendre des produits et ne sommes pas rémunérés par des objectifs de vente. C’est donc le client qui sollicite la banque pour un rendez-vous et non l’inverse», assure Marion Fogli.
Alpian obtient aujourd’hui 19 millions de francs à travers une nouvelle levée de fonds, laquelle succède à 16,9 millions en 2021 et 12,2 millions en 2020.
L’établissement est soutenu par Reyl Intesa Sanpaolo, une banque qui gère 25 milliards de francs avec 400 collaborateurs. D’ailleurs Pasha Bakhtiar, associé de cette dernière, préside le conseil d’administration d’Alpian. Une partie du capital appartient à Reyl et Fideuram Intesa Sanpaolo (actionnaire majoritaire de Reyl Intesa Sanpaolo), lesquels détiennent une part très significative mais non majoritaire. Le détail de la répartition n’est pas public.
«Nous ne sommes pas une plateforme technologique pour des épargnants qui estiment pouvoir gérer seuls leurs investissements», note Schuyler Weiss. Cet ancien de Morgan Stanley, ne veut pas être associé à l’idée d’une banque de gestion à bas coût. «Le prix du service doit simplement être compétitif pour sa valeur», juge-t-il. Le client recherché, plutôt jeune, dispose d’une fortune liquide comprise entre 100 000 et un million de francs.
Alpian facturera des frais de gestion compétitifs, inférieurs à 100 points de base. Ces frais comprennent des services de recommandation et de gestion, la sélection et le suivi des produits, la recherche sur les investissements d’Alpian, les partenariats avec des tiers pour obtenir des données et des informations, les frais de transaction et les droits de garde, ainsi que l’accès à des spécialistes. A cela, il faudra ajouter les coûts des produits (et les taxes), qui varieront selon le portefeuille de chaque client.
«C’est le client qui sollicite la banque pour un rendez-vous et non l’inverse» MARION FOGLI, COFONDACTRICE D’ALPIAN
Objectif: 5000 clients en 2022
L’idée d’Alpian est née de François Reyl, associé et directeur général de Reyl Intesa Sanpaolo, en 2017 et de son désir de créer une banque de gestion 100% numérique. «La raison tient à l’idée que les clients des banques méritent mieux. Ils ont trop peu de services ou trop de frais», déclare Schuyler Weiss. «Nous voulons changer la façon dont les clients aisés investissent. Nous sommes peut-être la seule banque à demander au client sa propre définition de la richesse et de lui permettre d’atteindre cet objectif. La notion de richesse est en effet relative et individuelle», selon Schuyler Weiss.
Dans cinq ans, nos deux interlocuteurs espèrent disposer d’un écosystème complet. Marion Fogli: «Le but n’est pas de croître pour croître mais de satisfaire les besoins du client». Il n’est pas prévu de sortir des frontières à court terme.
L’objectif pour 2022 est d’avoir 5000 clients parce qu’à partir de ce seuil la banque pourra offrir un haut standard de services, selon la direction. Elle espère, dans le cadre de sa croissance, ouvrir un bureau à Zurich et continuer d’engager à Genève, sans doute en dépassant la barre des 100 employés dès cette année. Le premier bénéfice de l’établissement est attendu entre 2023 et 2025, lorsque 70 à 80 000 clients devraient l’avoir rejoint. ■