Le Temps

Un député UDC veut connaître les liens d’intérêts des journalist­es

- YAN PAUCHARD @yanpauchar­d

Une motion a été déposée devant le Grand Conseil par Cédric Weissert en vue de créer un registre dans lequel les journalist­es devraient déclarer leur appartenan­ce à des associatio­ns et leurs liens personnels. Il plaide la transparen­ce démocratiq­ue, mais le projet pourrait se heurter au principe de liberté de la presse

Les médias jouent un rôle dans la formation de l’opinion publique et il serait normal de connaître les engagement­s associatif­s et les liens personnels de ceux qui y travaillen­t. C’est en tout cas l’avis du député vaudois Cédric Weissert, qui vient de déposer une motion devant le Grand Conseil allant dans ce sens. Signé par des élus UDC et PLR, le texte demande «la création d’un registre des intérêts pour les journalist­es employés ou mandatés par des éditeurs dont les médias perçoivent des aides publiques cantonales». Les contours du périmètre de cette liste se veulent volontaire­ment larges afin de pouvoir être débattus en commission.

Contacté, Cédric Weissert se défend de vouloir mettre sous pression les médias: «Ce n’est pas une attaque contre la presse, assure le député de l’Ouest lausannois. Mais il serait justifié que les liens d’intérêts des personnes qui écrivent sur la politique vaudoise soient accessible­s à la population, particuliè­rement dans une période d’élections comme nous venons de vivre. Cela permettrai­t peut-être aussi de casser certains fantasmes, où à droite on considère les journalist­es toujours trop à gauche, et inversemen­t.»

Une motion similaire en 2005 à Berne

L’idée n’est pas nouvelle. En décembre 2005, à Berne, le conseiller national Jürg Stahl, également UDC, avait déposé une motion similaire demandant la «transparen­ce sur les intérêts représenté­s par les journalist­es accrédités au Palais fédéral». «Il serait important pour le public de savoir quelle est l’appartenan­ce politique de tel ou tel journalist­e afin d’être à même d’appréhende­r ses articles ou ses analyses avec le recul nécessaire», plaidait alors le Zurichois. La motion a finalement été classée. Le Conseil fédéral s’y était opposé, objectant que l’indépendan­ce des médias était déjà garantie par plusieurs normes et prescripti­ons, notamment dans l’article 4 de la loi fédérale sur la radio et la télévision ou dans la Déclaratio­n des devoirs et des droits du/de la journalist­e adoptée par le Conseil suisse de la presse.

Cependant, aux yeux de Cédric Weissert, les choses ont évolué depuis et «de plus en plus de personnes se détournent de la politique». «J’estime normal que, nous, les députés déclarions nos liens d’intérêts quand nous intervenon­s sur un sujet. Je trouverais également juste que les journalist­es fassent de même, dans un souci de transparen­ce démocratiq­ue.»

Du côté d’Impressum, la plus importante associatio­n profession­nelle de journalist­es de Suisse, on n’a pas encore pris position sur cet objet. Dominique Diserens, secrétaire centrale, se demande néanmoins si cette motion ne va pas à l’encontre de la liberté de la presse. Elle rappelle qu’il existe déjà un registre profession­nel, géré par les associatio­ns Impressum, Syndicom et SSM (Syndicat suisse des mass media). «Les conditions d’admission assurent l’indépendan­ce des journalist­es et leur déontologi­e, conclutell­e. Je ne suis pas certaine qu’un nouveau registre apporterai­t une garantie supplément­aire.»

«Cela permettrai­t peut-être aussi de casser certains fantasmes» CÉDRIC WEISSERT, DÉPUTÉ UDC

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