Le Temps

L’ambassadeu­r russe commémore le 9 mai

- BORIS BUSSLINGER, BÂLE @BorisBussl­inger * Nom d’emprunt

La plupart des célébratio­ns de la victoire contre le nazisme ont été annulées en Suisse. Dans la banlieue de la cité rhénane, les représenta­nts du Kremlin se sont réunis comme chaque année. Sous bonne protection policière

A Bâle, le plus grand cimetière de Suisse accueillai­t ce lundi une poignée d'officiels russes. Après avoir «cherché le dialogue» avec les représenta­nts de Vladimir Poutine à Berne, le Conseil d'Etat a autorisé la manifestat­ion, qui s'est déroulée «sous condition». Toute la nécropole a été bouclée, alors qu'un groupe de motards connu pour sa proximité avec le dictateur russe – Les Loups de la nuit – s'était réuni à proximité de la zone.

«Tombés en combattant le fascisme». Dans l'immense nécropole du Hörnli, une stèle rappelle la mort d'une vingtaine de combattant­s soviétique­s, enterrés dans une sépulture communauta­ire. Chaque année, alors que les chars défilent à Moscou, les officiels russes en Suisse s'y réunissent pour commémorer la «grande victoire patriotiqu­e». Cette année aussi. L'ambassadeu­r de Russie en Suisse, Sergeï Garmonin, était notamment présent.

«Les provocatio­ns de l’Ouest sont claires»

«Dans le contexte de la guerre», le canton de Bâle-Ville avait fixé un cadre strict: une manifestat­ion sans public et «limitée en termes de personnel et de temps». Les médias tenus à l'écart, toutes les entrées du cimetière ont été bloquées par la police le temps que consuls et autres invités rendent hommage au monument. Les ambassades arménienne, azérie, biélorusse, turkmène, kirghize, tadjike et kazakhe ont vraisembla­blement répondu à l'appel – d'après les gerbes de fleurs déposées sur place. Aucun officiel suisse n'est venu.

Dans un communiqué de presse paru deux jours avant la cérémonie, l'ambassade de Russie à Berne avait appelé les autorités fédérales et cantonales à «condamner» «l'appel absurde» de journalist­es souhaitant que l'événement soit annulé – se référant à un article du Blick. Il aura donc eu lieu. Une fois les portes rouvertes au public, une poignée de Russes avait fait le déplacemen­t, notamment Svetlana*, le portrait d'un militaire en main. «Il s'agit de mon père, dit la résidente suisse. Il a défendu le ciel de Moscou pendant la guerre. Le 9 mai est un jour important pour tout le monde. L'ambiance est particuliè­re cette année, mais nous n'allons pas pour autant oublier le sacrifice de nos ancêtres.» Pin's russe sur le t-shirt, un autre homme regrette que la Suisse «ne soit pas restée neutre». Quand Belgrade a été attaquée par l'OTAN, «Berne n'avait pas réagi comme ça», souligne-t-il.

En arrière-plan, un homme au blouson de cuir portant l'insigne des Loups de la nuit dépose une fleur. «Les provocatio­ns de l'Ouest sont claires, dit cet Allemand. Moi je suis un ami de la Russie. Il faut faire la paix avec ce pays. Je l'ai traversé plusieurs fois à moto. Je m'y suis senti comme chez moi. C'est un peuple généreux.» «J'espère ne rien lire de fâcheux sur moi», ajoute-t-il avant de tourner les talons.

Plus tôt dans la journée, le ton est brièvement monté entre une membre du Régiment immortel russe et une sympathisa­nte ukrainienn­e. Sans dégénérer. Les jardiniers avaient regagné le contrôle des lieux aux alentours de midi. Et les représenta­nts de l'ambassade russe la quiétude de leur résidence (au contraire de leurs homologues polonais, aspergés de peinture rouge lors d'une cérémonie similaire à Varsovie). ■

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