A Davos, la vitrine occidentale d’un monde à la dérive
Le pèlerinage a pu reprendre: 2500 chefs d’entreprise, hommes et femmes d’Etat, représentants de la société civile et journalistes vont se retrouver sur «la montagne magique», à Davos, pour le Forum économique mondial (WEF). Après vingt-huit mois de pause et de reports imposés par le covid, les échanges se dérouleront dès lundi matin en chair et en os dans le cadre choisi par Thomas Mann en 1923 pour son roman. Les rencontres en coulisses, parties du mythe fondateur, auront lieu dans les salons privatisés de la station grisonne. Les enjeux ne manquent pas et constituent le coeur du programme: guerre en Ukraine et ses conséquences incalculables, pandémie du SARSCoV-2 non résolue, économie mondiale face à l’inflation et l’insécurité alimentaire, actions insuffisantes pour résoudre la crise climatique. Les démocraties occidentales sont mises au défi par les régimes totalitaires et l’économie globalisée ressemble aujourd’hui à un univers particulièrement fragmenté.
Créé en 1971 en pleine guerre froide par le professeur d’économie Klaus Schwab dans le but de faire réfléchir des dirigeants d’entreprise européens à leurs pratiques, l’European Management symposium a d’abord été un concentré de patrons du Vieux-Continent. Globalisé dès les années 1980 grâce notamment à la participation de la Chine, le forum affirme avoir évité des guerres, a mis en scène des poignées de mains historiques et a lancé des dizaines d’études et d’initiatives internationales. Il a dû gérer l’antimondialisation à grand renfort de sécurité avant de faire face, récemment, aux attaques de milieux complotistes.
Aujourd’hui? Toute représentation russe a été bannie et la Chine est quasiment absente en raison du covid. Aucun chef d’un Etat membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU ne sera présent. Certaines multinationales sont venues en délégations réduites. Néanmoins, le fondateur estime que cette édition sera «la plus importante» de son histoire et la Suisse a certainement une carte à jouer. Malgré les fidèles représentants de quelques pays asiatiques et africains, le WEF ressemble cette année plus à une rencontre entre Occidentaux et leurs amis qu’à un rassemblement mondial, symbolisant les vraies fractures géopolitiques et géo-économiques actuelles. Dans ces conditions, les résultats peuvent-ils réellement être planétaires? Que ce soit pour la guerre en Ukraine, le climat ou les autres sujets majeurs au programme, la montagne magique devra faire appel à tous ses génies pour faire émerger des solutions concrètes aux défis mondiaux de 2022.
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Le WEF ressemble cette année à une rencontre entre Occidentaux et leurs amis