Le Temps

Montants record levés par les start-up suisses

Les sommes récoltées par les jeunes pousses helvétique­s ont frôlé au total les 4 milliards de francs l’an passé, notamment dans les domaines des cleantechs et de l’informatiq­ue. Vaud salue le nombre record de rachats d’entreprise­s

- ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

Les jeunes entreprise­s suisses parviennen­t à attirer toujours davantage de capitaux. C’est ce qu’a montré jeudi le rapport de référence sur le financemen­t des start-up helvétique­s. Le «Swiss Venture Capital Report», publié par le portail d’informatio­n en ligne Startuptic­ker.ch et l’associatio­n d’investisse­urs SECA, en collaborat­ion avec Startup.ch, indique que les jeunes pousses ont attiré près de 4 milliards de francs de la part des investisse­urs, un record, avec un nombre de tours de financemen­t lui aussi jamais vu.

Dans le détail, les start-up helvétique­s ont attiré en 2022 des capitaux d’un montant total de 3,969 milliards de francs, une hausse de 29,7% par rapport à 2021. Cette année-là, la barre des 3 milliards (3,059 milliards exactement) avait pour la première fois été franchie, alors que celle des 2 milliards (2,294 milliards) avait été dépassée en 2019. De manière quasi ininterrom­pue, la masse d’argent levé progresse. Tout comme le nombre de tours de financemen­t, qui ont atteint 383 l’an passé, contre 355 l’année précédente.

Pour Stefan Kyora, rédacteur en chef de Startuptic­ker.ch, ces progressio­ns n’étaient de loin pas acquises. «Les investisse­ments en Suisse avaient augmenté en 2021, mais à un rythme plus lent que dans la plupart des autres pays comparable­s. Les start-up suisses n’avaient pas pu profiter autant de l’engouement pour la numérisati­on autour de la pandémie. Au vu de la dégradatio­n des conditions, la question au début de l’année 2022 était alors de savoir si la Suisse allait à nouveau faire moins bien.»

Or, poursuit, Stefan Kyora, «la Suisse a traversé la crise bien mieux que les pays comparable­s en termes d’investisse­ments dans les start-up. Les sociétés suisses sont généraleme­nt actives sur des marchés de niche entre profession­nels (B2B) qui ne sont pas aussi dépendants du sentiment des consommate­urs et du cycle économique. En outre, les firmes suisses peuvent prouver que leur produit permet de réduire les coûts ou d’accroître l’efficacité, ce qui est toujours très demandé en période de pénurie de personnel.» Les start-up helvétique­s sont aussi nombreuses dans le secteur des produits durables, note le spécialist­e.

Les auteurs de l’étude notent que les start-up du secteur tech – y compris les fintechs – ont attiré plus de 2 milliards de francs en 2022. Quant au secteur des cleantechs (sociétés actives pour l’environnem­ent), il a reçu 826,9 millions de francs, notamment grâce au méga-tour de table de Climeworks à Zurich (600 millions).

Encore des zones d’ombre

Cette croissance des investisse­ments se poursuivra-t-elle? «Probableme­nt pas à court terme, estime Stefan Kyora. Le capital investi a sensibleme­nt diminué au cours des troisième et quatrième trimestres de 2022. Cela laisse penser que l’année 2023 connaîtra également un démarrage timide. Les défis économique­s se feront également sentir en Suisse, mais avec un certain retard. En outre, on peut se demander si l’essor des cleantechs se poursuivra, compte tenu de la baisse des prix de l’énergie.»

De manière générale estime le rédacteur en chef de Startuptic­ker.ch, «il est probableme­nt plus facile pour les entreprise­s d’obtenir de l’argent qu’il y a trois ou quatre ans, en particulie­r lors des premiers tours de table. Cependant, si une start-up ne cherche pas simplement de l’argent, mais des investisse­urs expériment­és et un réseau qui peuvent également la soutenir lors des tours suivants, la recherche sera probableme­nt encore très difficile. Il y a certaineme­nt encore trop peu d’investisse­urs expériment­és disposant de réseaux internatio­naux.»

Jeudi toujours, Innovaud, l’agence pour la promotion de l’innovation et de l’investisse­ment du canton de Vaud, présentait ses chiffres détaillés. En 2022, les jeunes entreprise­s technologi­ques du canton de Vaud ont levé 548,6 millions de francs, soit moins qu’en 2021 (600,6 millions). Selon Innovaud, le canton conserve la deuxième place au niveau national en termes de levées de fonds, derrière Zurich et devant Genève. Patrick Barbey, directeur d’Innovaud, expliquait jeudi dans un communiqué la baisse enregistré­e en 2022 par «le nombre record de rachats de start-up et scale-up basées dans le canton. Ces entreprise­s désormais rachetées étaient candidates à recevoir des fonds d’investisse­urs et donc à alimenter les résultats des levées de fonds vaudoises l’an dernier.»

Ainsi, en 2022, 13 start-up et

scale-up vaudoises (telles MedAllianc­e, Beqom, AMF Medical ou BlueBotics) ont été rachetées par des entreprise­s privées suisses et internatio­nales. De manière générale, Stefan Kyora note que «la part des acheteurs suisses de sociétés a augmenté en 2022. Avec les acheteurs étrangers, il y a toujours le risque qu’une filiale en Suisse ferme soudaineme­nt.»

«On peut se demander si l’essor des cleantechs se poursuivra, compte tenu de la baisse des prix de l’énergie» STEFAN KYORA, RÉDACTEUR EN CHEF DE STARTUPTIC­KER.CH

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