Le Temps

«Il y a de quoi faire avec cette équipe», salive Stan Wawrinka

Pour son retour en Coupe Davis dans un rôle d’ancien – inédit pour lui –, le Vaudois a rempli son rôle en apportant le point décisif dans le sillage d’un étonnant Marc-Andrea Hüsler

- LAURENT FAVRE @LaurentFav­re

La Coupe Davis est morte, paraît-il. Samedi à Trèves, ce qu'il en reste avait l'air bien vivant, même ramassé sur deux jours et des matchs en deux sets gagnants. Vendredi et samedi, il y a eu de l'ambiance (4000 spectateur­s, guichets fermés), des rencontres indécises, des poings serrés et des index pointés sur la tempe. On pouvait voir au bord du court le visage tendu de Boris Becker, autre légende déchue, réhabilité après son séjour en prison dans un rôle de consultant de l'équipe d'Allemagne, et entendre à la télévision Marc Rosset se frotter les mains avant un point important comme un joueur de craps avant de jeter les dés.

Un rôle nouveau et inhabituel

Samedi à Trèves, il y a surtout eu pour la première fois en dix confrontat­ions la victoire de l'équipe de Suisse de Coupe Davis sur l'Allemagne, trois victoires à deux. Stan Wawrinka a apporté le point décisif en battant Daniel Altmaier 6-3 5-7 6-4 au terme d'une très longue journée qui l'avait d'abord vu perdre le double aux côtés de Dominic Stricker face à la paire Andreas Mies/Tim Pütz, aux automatism­es et à la stratégie mieux rodés (6-7 6-3 6-4).

«J'ai le sentiment que nous aurions pu mieux faire dans le double. Je suis très content de m'en être finalement sorti après, il est vrai, une journée très chargée, expliquait Stan Wawrinka en fin de soirée à l'ATS. Heureuseme­nt, MarcAndrea [Hüsler] a livré un match extraordin­aire pour me donner la chance de disputer le simple décisif. C'est grâce à lui et ses deux victoires si nous étions toujours en vie.»

Car si Stan Wawrinka, 37 ans, est revenu en Coupe Davis après sept ans de réflexion dans un rôle nouveau pour lui d'ancien, il a retrouvé en revanche sa place habituelle de numéro deux. Roger Federer désormais devant sa télé, MarcAndrea Hüsler a une nouvelle fois surpris tout son monde en remportant ses deux simples, un peu fébrilemen­t vendredi contre Oscar Otte (2-6 6-2 6-4), avec une épatante autorité samedi contre Alexander Zverev (6-2 7-6). Classé au 49e rang mondial, le Zurichois est mathématiq­uement le meilleur joueur suisse du moment, une septantain­e de places devant le trio Stan Wawrinka/ Leandro Riedi/Dominic Stricker. Pourtant, l'environnem­ent du tennis suisse (dirigeants, public, médias) peine encore à l'envisager durablemen­t comme l'excellent joueur qu'il est. Parce qu'il n'a

«Je suis heureux d’avoir pu leur offrir ce troisième point. Ils le méritent» STAN WAWRINKA

jamais été celui sur qui Swiss Tennis misait, parce qu'il n'a jamais brillé chez les juniors, «Mac» Hüsler reste un outsider. Ses victoires sont saluées comme d'heureuses surprises alors que les défaites des jeunes Stricker et Riedi sont comprises comme des incidents de parcours.

Marc-Andrea Hüsler possède pourtant un très beau tennis et deux qualités rares: il ne cesse de progresser et semble jouer chaque point de la même manière (même si son bras gauche trembla méchamment lorsqu'il manqua l'opportunit­é de conclure sur son service à 6-2 5-4). «C'est toujours plus facile de jouer contre de meilleurs joueurs», a sobrement commenté le héros du week-end, dont la modestie dans l'analyse contraste avec l'audace sur le court.

Même si Alexander Zverev n'est pas encore redevenu le joueur de niveau top 5 mondial qu'il était au moment de sa grave blessure l'an dernier à Roland-Garros, le champion olympique de Tokyo est tombé de haut devant son public. «Je ne connaissai­s pas si bien Hüsler, il a commencé à bien jouer quand j'ai été blessé, avoua l'Allemand. Je savais que c'était un bon serveur et qu'il jouait de manière agressive mais il s'est aussi montré très intelligen­t tactiqueme­nt. Je dois dire chapeau pour sa performanc­e.»

Poursuivre l’aventure

Ce succès permet à l'équipe de Suisse de Coupe Davis de poursuivre l'aventure en septembre pour l'étape suivante, abusivemen­t qualifiée de «Davis Cup Finals». Il s'agira en fait d'une phase intermédia­ire, avec 16 équipes réparties dans quatre groupes de quatre. La France, la Serbie, les Etats-Unis, la Suède et la Grande-Bretagne se sont également qualifiés samedi alors que quatre pays – Canada, Australie, Espagne et Italie – étaient qualifiés d'office.

Les matchs de la phase de poules se joueront dans quatre pays différents, du 12 au 17 septembre. Le tirage au sort n'a pas encore eu lieu, pas plus que la désignatio­n des villes hôtes. Swiss Tennis n'a jusqu'ici pas manifesté son désir d'accueillir les rencontres du groupe de la Suisse. Seuls les deux premiers de chaque poule – huit équipes en tout – seront qualifiés pour la phase finale prévue du 21 au 26 novembre à Malaga.

D'ici à septembre, Swiss Tennis espère que les jeunes Dominic Stricker et Leandro Riedi (resté sur le banc ce weekend) auront accumulé de l'expérience afin d'épauler Marc-Andrea Hüsler et Stan Wawrinka. A Trèves, le Vaudois était heureux à titre personnel («J'ai pu enchaîner beaucoup de tennis en deux jours, c'est exactement ce dont j'avais besoin») mais surtout pour ses jeunes coéquipier­s, qui ont tous dix à quinze ans de moins que lui. «Je suis heureux d'avoir pu leur offrir ce troisième point. Ils le méritent. Ils se sont battus ces derniers mois pour que l'équipe de Suisse retrouve une place bien plus conforme à son rang. Il y a de quoi faire avec cette équipe.»

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